Mostranso
2022-08-26 11:07:54
Le week-end du 20 août dans un village voisin de Meisenthal et frontalier du Bas-Rhin, c’était le « Souchter Kirb ». Quatre jours de festivités estivales et une place de choix pour les « conscrits » de la commune, c’est-à-dire celles et ceux qui ont 18 ans dans l’année. Mais ce n’est pas des manèges, de la musique et des danses dont Amin (prénom modifié), 17 ans et habitant d’une commune voisine, se souviendra.
À Rue89 Strasbourg, le lycéen témoigne. Il connait l’identité des deux jeunes adultes qui l’ont agressé :
« Ce sont deux frères que je connais parce qu’ils sont souvent présents aux soirées des villages, mais pas personnellement. Le week-end précédent, à une autre fête, l’un deux m’a dit “Les Arabes ce sont tous les mêmes”. Je n’avais pas réagi sur le coup. Puis vendredi et samedi soir à Soucht, ils reviennent me chercher. Je ne réponds toujours pas. Arrive le dimanche soir, j’étais à la fête vers 23h avec des amis et je suis allé chercher des amis dans un champ. Quand je suis arrivé derrière une tonnelle vers 3h, j’ai entendu : « Les arabes c’est des merdes, faut tous les mettre sur des planches et les brûler ». C’était un père de famille, il était très saoul. Je suis allé le voir et le ton est monté. Un des jeunes frères qui était avec lui m’a dit « Encore toi » et « Tu fous encore la merde » et m’a poussé. J’ai donné le premier coup puis le père m’a mis un coup à la mâchoire. On a été séparés. »
Le jeune homme, qui n’est qu’une ancienne connaissance d’Amin et n’a pas passé la soirée avec lui, note aussi qu’avant cela, il y avait déjà un climat tendu sur le champ. « Vers minuit, avant qu’Amin arrive, il y avait déjà eu des personnes visées par des propos du type « Cassez vous, vous n’êtes pas les bienvenus. Dégagez si vous êtes arabes ».
Amin raconte l’irruption des agresseurs :
« L’un des frères a pointé le flash de son téléphone sur moi et a dit “Ils sont là, il est là l’arabe”. Je leur ai dit d’arrêter et je me suis défendu. J’ai été mis au sol et plusieurs personnes, trois ou quatre, se sont mises sur moi, j’ai été roué de coups. Je ne sais pas si j’ai reçu des coups de poing américain, mais ça a été le cas pour l’un de mes amis, qui est noir. Heureusement qu’il y avait des amis autour de moi et que des gens sont intervenus. Les agresseurs ont fini par partir. »
Les urgences de Bitche, où Amin a passé la fin de la nuit, ont délivré au néo-bachelier une interruption de temporaire de travail (ITT) de trois jours. La docteure relève six blessures, notamment un hématome de 3 cm de long à la mâchoire, une plaie à l’index ou encore une « cervicalgie avec douleur ». « J’avais mal au cou, j’ai dû porter une minerve », décrit le jeune homme. Encore choqué et traumatisé, il a rendez-vous pour un suivi psychologique. « Physiquement ça va, mais psychologiquement c’est dur. Je revois ces images en boucle ».
https://www.rue89strasbourg.com/agression-raciste-soucht-conscrits-243602