StoreV6
2021-10-21 22:07:59
Depuis que je suis venu au monde j'ai ce désir systématique de vouloir chier à plusieurs.
Lorsque j'étais plus jeune, c'étaient des invitations à mes cousins et cousines, qui eux aussi étaient jeunes, dans le but de partager avec moi ce moment où l'on pose sa commission. Insouciants, personne n'y voyait là un quelconque problème mental ni affectif.
Alors à tour de rôle, on faisait caca. Chacun attendait son instant de détente, tous réunis dans une seule et même salle d'eau. Puis nous avons grandi et ce besoin irrépressible de déféquer en file indienne ne s'essoufflait pas, il persistait. Mais les autres, eux, avaient fini par abandonner cette pratique devenue pourtant habituelle et même conviviale.
Aux alentours de 10 ans je me sentais terriblement seul lorsque venait le temps de poser ma crotte.
Je pensais, nostalgique, à ces éclats de vie partagés autour d'un cuvette de WC, dans les odeurs fétides mais enivrantes de nos étrons mélangés.
Un beau jour j'ai décidé, sur un véritable coup de tête, de reprendre du service. J'ai demandé à mes proches, mes amis, ma famille et certaines de mes connaissances pourtant lointaines, de m'accompagner aux toilettes lorsque je libère le kraken.
Tous, sans exception, ont catégoriquement refusé ma requête. D'aucuns me pensaient fou à lier, d'autres me conseillaient de consulter et certains m'ont radié de leur cercle social.
J'étais déboussolé.
Pourquoi ces individus, pourtant disposés à démouler leur merde avec moi fut un temps, ont-ils graduellement tourné leur veste ? J'admets ne rien y comprendre.
Pour y remédier et retrouver un semblant de fougue dans ces tristes jours, j'ai élaboré tout un stratagème.
La nuit, je cale mon réveille-matin à 4h00 précises. Je me lève, sors de mon lit, de ma chambre et choisis une pièce parmi tout un panel de chambres où crèchent les membres de ma famille. C'est du pur hasard, le choix est arbitraire et varie de nuit en nuit. L'autre nuit, ce fut celle de mon petit frère.
Alors, simplement, j'ouvre sa porte et pénètre dans sa chambre. Au préalable, je me suis assuré d'apporter une bassine en zinc dans laquelle j'ai astucieusement disposé quelques feuilles de papier toilette. Et pendant qu'il dort à poings fermés, je place la bassine face à son lit.
Ainsi je ressens la présence de quelqu'un. Je ferme la porte et m'adonne à déféquer, le cul posé sur la bassine et l'esprit soulagé.
C'était d'une jouissance indescriptible tant les sensations d'une enfance peuvent vous transcender lorsqu'elles ressurgissent.
Lorsqu'enfin je considère avoir terminé mon travail, j'emballe mes excréments dans le papier toilette prévu à cet effet. Je vais finalement les jeter dans mes toilettes puis tirer la chasse, je ne suis pas un malpropre. Après m'être bien nettoyé le séant, je me rendors enfin.
Ne pas aimer chier tout seul, ce peut être un frein dans mon quotidien. Pas tout le monde, manifestement, n'essaie de comprendre ce que moi j'aspire à faire. Et je dois dire que ça me peine, ça me peine de voir qu'il y a de moins en moins de gens altruistes et conviviaux en ce monde.