Newbitdecheval
2021-08-26 13:41:12
J'ai 27 ans et bizarrement ça ne fait vraiment qu'un an tout au plus que j'ai pris conscience de ma position sociale. Avant cela je n'avais pour ainsi dire aucune conscience de classe, j'ignorais les jeux de pouvoirs et je ne m'y intéressais pas. Je pensais simplement que chacun était libre de se définir comme il le voulait. Bien sûr je savais que certains étaient plus riches que d'autres, je le voyais, mais ça ne m'effleurait pas.
C'est seulement maintenant que je me rends compte que non, il suffit pas de vouloir être quelque chose pour l'être véritablement. J'ai lu beaucoup de livres et maintenant j'éprouve un dégoût, une haine et une rancoeur à l'idée qu'ils furent tous écrits par et pour des gens mieux nés que moi.
Alors oui, les études marchent, pour ceux qui ont la force de les entreprendre. Mais ça ne suffit pas face à des gens qui peuvent côtoyer tout le gratin et qui peuvent se retrouver propulsés au détour d'un dîner.
Je voulais être écrivain, pour cela j'avais accepté la pauvreté, comme un sacerdoce. Tout ce que ça m'apportera ? Une pièce pleine de livres et de feuilles dans une bicoque minable de province. Et même pas l'oubli, la non connaissance. Et le mépris de ceux de ma classe qui ne voit en moi qu'un espèce de fou prétentieux qui donc, prête à rire.
Je me sens perdu. Le bonheur simple et naïf qui était le lot de ceux de ma condition ne m'est plus désirable, ni même je crois, accessible. Et pourtant, l'espoir d'être adopté par cette espèce d'élite bourgeoise est presque trop mince pour être vu à l'oeil nu. D'ailleurs, jamais je ne serai d'eux, même si j'y arrivais. J'ai fini par mépriser ceux là aussi. Plus que les autres encore. Les vices de l'aisance ont plus l'odeur du souffre que ceux de la nécessité : ceux là puent la misère, la mauvaise lessive et le tabac.