En haut lieu, ils se marrent bien. Ils savent pertinemment que le système est bétonné comme jamais dans l histoire il ne l a été, ils rient du concept de démocratie, de méritocratie. Voyez-vous, ils mettent leur savoir en commun, eux. Ils sont d'ailleurs, pris comme un tout, très bien éduqués. La sociologie, l'économie hétérodoxe, la finance, la psychologie, tous ces domaines sont entre leurs mains, ils leur donnent l'orientation voulue et, bien qu'ils les dénigrent, nulle autre classe leur dédie plus d estime.
En effet, comment mieux dominer cette dangereuse masse qu en maniant les sciences sociales tout en les dénigrant ?
Aucune autre classe, par exemple, n'est plus consciente de la menace existentielle qui pèse sur l'avenir de l humain sur terre. C'est d'ailleurs une nouveauté, un challenge, puisque pour la première fois de l histoire de la bourgeoisie les intérêts des basses classes rejoignent les leurs, tandis que le vieux programme continue à les opposer à celles-ci.
Alors comment faire? Comment concilier une population héritant de vieilles conceptions paysannes, traditionnellement farouches, structurellement incultes, et une population ayant bénéficié de l'âge d'or énergétique qui lui a donné accès à une éducation de qualité et qui, pourtant, est elle aussi son ennemie?
Solution: les dissoudre, tous. Par diverses approches que je ne détaillerai pas sous peine de ban.
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En haut, ils savent pertinemment que les self scan qui se sont généralisés dans les magasins d alimentation, lieu totalitaire stratégique entre tous, sont du lest lâché volontairement et destinés à garder les éléments les plus intelligents hors d'état de colère telle que la révolution deviendrait inévitable.
C'est-à-dire qu' il est extrêmement facile, à condition de ne jamais abuser, de ne scanner que 75% de ses articles alimentaires. Il n'y a que 1% de contrôle, et cela depuis deux, trois ans. Et aucune loi ne punit l oubli ou l'état d'esprit troublé ponctuel.
L Inflation étant maîtrisée, programmée, quelque pourcents qui grugent sans jamais pouvoir oser l'avouer dans un océan de conformisme ne fait que légèrement réduire les immenses profits induts.
Ce n'est pas une faille, c' est intentionnel. Les éléments capables de calculer, et assez dénués de naïveté pour exploiter rapidement cette possibilité sciemment offerte, sont aussi les éléments capables de galvaniser une foule affamée.
On achète tacitement les potentiels leaders, et on trouvera une autre parade lorsque la tension croîtra encore.
Enfin, ceux qui comprennent cela sont détruits de l'intérieur par le dilemme qui leur est imposé : profiter des restes de confort, en mesurant les espaces vides qui les separent de la masse, ou renoncer et être réduits à des estomacs vides hurlant dans le désert.
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Toute la sous-culture, qui a pris une dimension symbolique et une part proportionnelle énorme en 20 ans, glorifie le crime, illustre les états d'esprits, renseigne les masses sur les modus operandi et le lexique idoine.
Le but est bien évidemment de "brutaliser " les masses, leur donner le sentiment d etre plus aptes à survivre dans un monde de plus en plus sauvage. Oubliées les grandes idées humanistes, les seules idées positives sont ringardes, les seules idées intellectuelles sont de présentées comme de l'oppression.
La culture d aujourd'hui et, plus encore, de demain, est à l ultra violence. La part de films et séries dédiées au crime, au trafic de drogue, au meurtre gratuit, aux déviants de toutes sortes, a explosé.
Il y en a pour tous les goûts. Le crime en col blanc, en blouson noir, en survêtement. Il ne faut pas s'étonner que les bobos, les écolos, tous mes alternatifs qui ne conviennent pas à l'idéologie, passent inconsciemment pour faibles. Ils ne sont tout simplement jamais décris autrement.
Et pourquoi les méchants, ceux qui sont mobilisés par des valeurs jadis désignées comme mauvaises, ne pourraient t ils pas être, eux aussi, des héros?
Il faut que le peuple se prenne dans cette belle toile enduite de glu, la toile blanche tendue dans la nuit, la toile de ce qu'ils ne sont précisément pas, ce qu'ils sont moinsque jamais: des criminels. Une toile irrésistible.
Faisons les vénérer le crime, et assurons nous qu'ils ne le voient uniquement que comme un fantasme. Faisons les rêver d'un idéal régressif.
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