Messages de green_marocain
Lu dans le Psikopat (no 74, janvier 1996). Témoignage de Jean-Louis (93), réécris par Fred Neidhardt.
Quand je m´en rappelle maintenant, ça me fait rigoler, mais le jour où ça m´est arrivé, pour le petit chiard de quinze ans que j´étais, c´était plutôt la catastrophe...
Ce matin-là, je me lève en retard, ma mère m´a déjà appelé dix fois, mais je suis pas en forme, mal au bide. Encore cette putain de chiasse qui me tient depuis deux jours, je file aux chiottes. Mais je suis tendu, ça vient pas, vite, le cours commence dans dix minutes et je suis à une demi-heure du bahut...
Tant pis, trop pressé. Ce matin j´ai sport, je prends mon sac Adidas et je file. J´arrive directement aux vestiaires, ça pue les chausettes, merde, y a plus personne, y sont déjà dans le gymnase. En général, le prof est chiant pour les retards, pourvu qu´il me demande pas un mot des parents, ça me stresse. Et plus je m´angoisse, plus ça me vrille les intestins, la chiasse, putain !
Ah, et puis en plus, dans ma précipitation j´ai oublié mes baskets ! J´arrive dans la salle, le bas du futal de survête tiré au maximum sur mes pieds pour cacher mes mocassins, je me faufile discrétos derrière les autres.
Ca va, le prof n´a pas remarqué mon retard, mais il a vu mes pompes :"Hé Vidal ! Si t´as oublié tes baskets, tu te mets en chaussettes !" Je m´exécute, ils se foutent de ma gueule :"Putain ça schlingue ! Hé Vidal, les pieds c´est comme le cul, ça s´lave !" L´air con...
Et j´entends mon ventre qui gargouille, j´ai l´impression que ça résonne dans tout le gymnase. J´ai mal, j´ai mal !
Le prof nous dit qu´aujourd´hui on fait du trampoline. Ah cool, j´adore ça, j´en faisais quand j´étais petit sur la plage, au club Mickey. Quand c´est mon tour, je prends un max d´élan, je vais les épater, je me fais le saut périlleux avant...
Suspendu en l´air comme un oiseau, je me ramasse pour tourner sur moi-même, mes cuisses viennent taper sur mon ventre... Pflach, le crash en plein ciel, c´est l´explosion dans mon jogging. Je sers les fesses, mais trop tard, et quand mes pieds retrouvent le sol, je ne suis plus qu´un survêtement fourré à la merde.
C´est pas croyable, personne ne s´est aperçu de rien, et pourtant ça pue la merde, une odeur dix fois plus immonde que quand on chie aux chiottes, j´ai l´impression qu´elle fait partie de moi, qu´elle m´envahit...
Rouge de honte, je m´éclipse discrètement, direction les toilettes. J´ouvre le paquet-cadeau, c´est l´apocalypse...
Toutes les petites feuilles beiges et trop lisses du pécu fourni par l´administration scolaire y passent, pour tenter d´endiguer le raz de marée. La chiasse a même dégouliné le long de mes jambes, jusque sur mes chausettes. A peine plus, je laissais une trace merdique entre le gymnase et les chiottes.
Voilà. Depuis ce jour, je m´efforce de ne plus concilier diarrhée et trampoline.