Le 26 avril 2022 à 13:17:15 :
Tu vas essayer d’le faire éditer ? J’lis ça j’te donne mon avis de lecteur médiocre après.
Oui on verra, pour être honnête je préfère rester évasif sur le sujet.
Pas grave je suis moi aussi un lecteur médiocre.
Le 26 avril 2022 à 13:18:14 :
J'aime pas, je te conseille de mettre des personnages intéressants comme Belle Delphine et Spiderman et aussi plus d'action
Tu as le droit
Et je ne sais pas qui est belle Delphine.
Spider-Man est sous licence
Le 26 avril 2022 à 13:16:02 :
Vraiment pas mal moi je veux la sweet sur kindel je présume ?Le quatrième mur c'est volontaire ?
Merci khey
Non
Et oui, je voulais de l'humour. Ras le cul des thriller full sombre. Je sais pas si ça rend bien de faire sauter le 4eme mur, j'ai peur que ça nuise à la crédibilité générale. Comment tu l'as senti toi ?
Non, le jeune adepte de la PlayStation n’est pas… n’était pas pardon, mon fils, ni un parent d’ailleurs. J’ai donc attendu un an et demi avant de me rendre au domicile de sa famille. Un moment compliqué, délicat si on veut être technique. Ils habitent un pavillon dans un quartier calme, le genre de coin où il n’y a que des blancs. Des Portugais, des Serbes, des Français d’adoption comme on les désigne dans les médias. Ceux-là mêmes qui répondent sans honte qu’ils sont Portugais et Serbes. Mais bon, ils aiment quand même la France, leur deuxième choix en somme ! La famille se nomme Laffoucrière, en général j’évite de prononcer leur nom, je les appelle les créditeurs, parce que la société leur doit quelque chose de fondamentale, une dette qui ne devrait jamais exister !
J’ai attendu un bon moment, en tout cas le temps de voir à quoi ils ressemblaient. Quand un type est enfin sorti dans le jardin, il a juste trifouillé sa poubelle. Un vieux type, soixante ans, peut-être plus, le malheur ça vieillit, l’amour aussi. Un physique de couillon de contribuable, le genre à qui on demande tous les efforts, et qui ne reçoit rien en retour, pas même du respect.
Après ça, j’ai fait ce que j’avais à faire, j’ai ouvert ma portière et je suis allé lui parler. Je ne suis pas un débutant, j’ai su quoi dire, quel ton adopter, où appuyer pour qu’il me fasse entrer, qu’il ait envie d’écouter la suite. Qu’il se dise pas « ce type est un taré ! » Par contre, peu de chance qu’il appelle la police, avec ce que lui ont fait vivre les enquêteurs, les juges, son avocat… Putain les avocats ! Il a retenu la leçon.
En sortant de chez eux, je savais quoi faire, tuer Hassan Maïf d’un coup de révolver ! Non je blague ! Pas d’un coup de révolver, déjà c’est con, et ensuite ça fait beaucoup de bruit… En revanche pour le tuer, j’étais parfaitement sérieux. Les parents m’ont donné leur accord. Une fois qu’ils y ont cru, qu’ils ont su que je ne les baratinais pas, ils m’ont dit oui, un vrai oui ! Ils ont failli me supplier de le faire… Le père s’en serait bien chargé, mais il a une autre fille, plus jeune, et la mère Laffoucrière pleurait à s’en terrasser la tronche, déformée par le chagrin, la haine, la violence, la perte d’un enfant quoi... Si on avait un minimum procédé comme dans une société civilisée, elle aurait vécu son deuil différemment. À la place, elle en veut au monde entier, aux magistrats, aux arabes, aux flics… La liste est longue… Moi de la haine j’en ai pas, heureusement d’ailleurs ! Je sais pourquoi je fais ça. Je fais ce que cette bande de profiteurs qui nous dirige est incapable de faire, un truc bien, un truc moral. En somme, je rends justice ! On pense souvent que c’est barbare de tuer les gens… C’est vrai lorsqu’on le fait gratuitement, mais c’est tout aussi barbare de les épargner quand ils le méritent. Sans sanctions, sans exécutions, sans tri, les torchons déteignent sur les serviettes, et le linge se met à puer…
Il commence à s’agiter le Hassan. Il n’a pas apprécié que je force le passage. Autant éviter de le braquer.
- Ah bon ? L’immeuble d’à côté ?
Faire l’ignorant ça détend en général, ils deviennent compréhensifs… Je continue.
- Je ne dois pas être doué, je n’ai pas vu d’autre entrée ?
Je vois tout de suite le geste d’agacement sur ses lèvres, mais il prend la peine de se tourner pour se mettre dans le bon sens et m’expliquer, foutu sens de l’orientation qui le trahit… L’aiguille rentre comme dans du beurre, pile au niveau du cou. C’est pas des conneries quand on entend un infirmier dire que piquer est un art ! Y’a plein de moyens de se planter et de louper la cible. Ça peut vite dégénérer. Bon vu la gueule qu’il tire… Il a compris que j’étais pas médecin. Je pense qu’avec ma blouse, mon crâne dégarni et mon éloquence naturelle, il hésite entre épicier et dame de service… On va lui laisser le temps de se prononcer.
Je l’installe sur son canapé, au milieu, à l’endroit le plus creusé. J’ai pas le luxe de jouer à l’agent immobilier, mais c’est nickel chez lui. Pourtant, il n’a pas de femme de ménage et pas de copine. Il prend donc le temps de ranger. Les gens dépressifs, rongés par la culpabilité, les vrais, sont souvent dans la négligence d’eux-mêmes et de leur environnement. Là, pas du tout, il a gardé sa routine bien huilée. Je viens de lui injecter de la benzodiazépine, un anxiolytique. Comme il est sous traitement, aucun légiste ne trouvera ça suspect, peut-être soupçonnera-t-on une surdose, mais il ne serait pas le premier à en abuser. Dans tous les cas, ça ne le tuera pas, il va se réveiller sous peu. On a encore des choses à se dire. Je me dépêche donc de déballer la scène : garrot, aiguilles, seringues, et une boite discrète en métal qui se transporte facilement dans la poche. Reste plus qu’à la badigeonner avec de belles empreintes à moitié effacées, contaminer le tout avec le sang du gros et vous obtenez l’attirail du parfait junky. Avec ses antécédents et ce que je compte lui faire subir, personne ne jouera au fouille-merde.
- « Bonjour ! » que je lui balance avec mon plus beau sourire. « Alors ? Heureuse ? »
Il comprend ce que je raconte, même si ça n’a aucun sens… Par contre, il ne peut pas remuer, pas crier, pas même parler, mais ça ne durera pas non plus.
- Tout va bien monsieur... Je ne suis pas médecin, je m’appelle Jean-Claude et je viens vous voir à propos d’Alexandre Laffoucrière…
Il vient de tiquer ! Et ça ne le rassure pas…mais alors pas du tout. Il a la tronche du mec qui sait qu’un malheur va lui tomber sur le coin de l’œil.
- Je n’ai pas besoin de vous expliquer de qui il s’agit ? Non… Visiblement vous savez de qui je parle… C’était un brave gosse, vous l’avez renversé après une soirée à picoler et à vous défoncer, une mauvaise habitude… Sa famille a demandé justice, ce qui lui a été refusé par les autorités de l’État…
Il tente de baragouiner un truc, il commence à récupérer, normal avec sa carrure.
- Je ne suis là ni pour vous juger, ni pour débattre de votre culpabilité, elle ne fait aucun doute. Je suis là uniquement pour exécuter la sentence… Croyez-le ou pas, ça n’a absolument rien de personnel. J’aurais préféré que le petit Alexandre soit en vie, et que vous, vous continuiez à être une fée du logis… Mais quand la flamme s’éteint, quelqu’un doit venir la rallumer. Pardon pour mon acte, pardon pour les vôtres.
Bon… Je vois bien qu’il a pas aimé le speech… Il aime encore moins la seringue remplie d’héroïne que je m’apprête à lui coller dans le bras… un gramme entier… Le cas le plus fréquent d’O.D concerne ceux qui ont réussi à arrêter, puis qui rechutent en pensant avoir la même tolérance à la drogue. Ils s’injectent alors une dose identique à celle qu’ils prenaient auparavant. Overdose assurée ! Je lui vide jusqu’au dernier milligramme dans les veines, pas de gâchis ! Les convulsions seront là en un rien de temps, mais il ne souffrira pas, en fait il ne sentira absolument rien… Il n’y a que de l’extérieur que ça parait horrible, l’embardée cardiaque, les vomissements, les contractions spectaculaires de la mâchoire, c’est vrai que ce n’est pas très vendeurs et que c’est impressionnant, mais croyez-moi sur parole, c’est un voyage tranquille… Et si vous pensez que je mens et que je ne fais que me soulager la conscience pour l’acte que je viens de commettre, demandez donc à un accro aux opiacés dans votre entourage. Ça vous surprendra d’apprendre que les égoïstes s’en vont dans la douceur d’une mort sans douleur...
Allez, on s’active ! On reprendra cette discussion plus tard… Place au travail de précision, mettre le corps de notre ami dans la position adéquate, étaler ses empreintes sur le matos de shoot. Vérifier consciencieusement qu’il ne m’a ni griffé, ni arraché de cheveux en se débattant. Pour la première ça va être assez rapide. Ses ongles sont nets et coupés à ras, avec ça il n’égratignerait pas une peau de bébé. Quant à mes cheveux, sujet sensible… Y’en a plus énormément, mais après vérification c’est quand même négatif. 17 h 50, je suis dans les temps, encore une demi-heure avant que les habitants de l’appartement voisin pointent le bout de leur nez. J’inspecte une dernière fois la pièce. Un ultime regard au gros Hassan qui se bave dessus. Visiblement, il en a plus pour longtemps. Il respire comme un bœuf, son corps cherche à pomper tout l’oxygène qu’il peut pour ventiler la drogue, mais il n’y arrivera pas…
Je claque la porte et descends les marches aussi légèrement que me le permettent mon mètre quatre-vingt-neuf et mes cent dix kilos. Je n’aime pas me jeter des fleurs, mais j’adore le travail bien fait ! Et on est pile dedans : personne ne le fréquente, son travail signalera son absence dans deux jours et comme on est en zone gendarmerie, et qu’ils sont du genre consciencieux, dans moins d’une semaine son corps sera à la morgue. Il a payé maintenant, il mérite qu’on l’enterre dignement avant qu’il ne se mette à puer et à ressembler à un sac-poubelle.
J’ajuste mon couvre-chef et je pousse le bouton d’ouverture de la porte qui me répond avec le léger clic électrique. Misère de merde… Y’a un gyrophare dehors !
Je me mets sur la pointe des pieds pour lorgner le reflet dans la vitre. Je crois que ce n’est qu’une ambulance… Mais elle est collée au cul de ma 405... C’était trop simple de toute façon !
Bon, faut réfléchir vite ! Je ne risque pas grand-chose à rester un peu dans le hall, mais d’un autre côté si un locataire débarque et qu’il engage la conversation, je serais bien obligé de lui faire la causette. Ce qui lui donnera tout le loisir de se rappeler de ma tronche si un gendarme zélé décide de pousser l’enquête. Second choix, je fais mine de rien et je demande gentiment aux ambulanciers de se pousser, mais idem je m’expose trop à mon gout. Les gars pourraient me poser des questions, et on va pas se mentir, malgré mon accoutrement de docteur, je ne tiens pas la route niveau discours médical. Une boulette et ils me démasqueront et se souviendront de ce drôle de médecin qui trainait dans la résidence le jour de la mort de notre pote toxico. La poisse ! Voilà pourquoi je déteste les appartements ! Je vous avais prévenu ! D’ailleurs si vous avez des idées c’est le moment de me les souffler, parce que je ne tiendrais pas éternellement le cul entre deux chaises !
Je vais devoir trancher ! Je me débarrasse de ma blouse en la roulant en boule au fond de ma sacoche, pareille pour le stéthoscope, le badge y passe aussi ! Il fait assez frais dehors, je vais passer pour ce genre de type qui sort l’hiver avec un simple pull alors que la température est négative, mais tant pis ! Allez, on a perdu trop de temps, on fonce … J’entrouvre la porte et je comprends aussitôt pourquoi les ambulanciers sont là. L’un d’eux accompagne un petit vieux en le soutenant par l’épaule. Il est mûr celui-là… C’est effrayant la vieillesse, ça nous renvoie à notre côté périssable, on finit à la limite du moisi… Mieux vaut s’appliquer à réussir ce qu’il y a avant, parce que quand on arrive là, c’est ce qu’il y a après qui doit nous travailler. En tout cas, il n’est pas près d’arriver, je lui passe devant alors qu’il est encore à mi-chemin. Le collègue lui est accoudé nonchalamment sur la portière conducteur, un grand avec une queue de cheval qui transpire le mec blasé et désagréable. Visiblement, il n’aura aucune envie de tailler le bout de gras.
- Bonjour ! Je suis un peu pressé… Si ça vous dérange pas de…
Il me répond par un son guttural, qui signifie clairement que je le fais chier, et c’est tant mieux. Je démarre le moteur en attendant qu’il veuille bien déplacer son corbillard. On rentre, j’en ai définitivement fini ici. Il nous reste juste une dernière chose à faire.
Salut les kheys, comme le titre l'indique, un peu de lecture et un avis siouplé !
Je l'avais fait pour mon premier roman et j'avais eu des retours intéressants, je renouvelle donc l'expérience en mettant le début.
Dernière chose ne tenez pas trop compte de la mise en page, le forom est une vraie galère a ce niveau. J'ai fait ce que j'ai pu.
Chapitre 1
Je déteste les pages politiques dans le journal. J’ai pris l’habitude de les passer rapidement, surtout au réveil. Ça m’évite d’avoir la vilaine sensation qu’on se moque de moi dès le matin, et mon avis, c’est que je n’y perd pas grand-chose. Tiens le PSG a encore gagné un match… Je suis assez vieux pour me rappeler la dernière fois que le club a enchainé autant de victoires, c’était au temps de l’entraineur Fernandez, de Ginola, Weah, Le Guen. Ces gars-là n’étaient pas les meilleurs, par contre c’étaient des guerriers qui ne lâchaient jamais rien ! J’ai pas vu une seule rencontre cette saison, pas vraiment le temps, mes horaires de boulot sont trop aléatoires.
On attaque le vif du sujet. Les faits divers ! Le Parisien, c’est quand même une référence dans le domaine. Un quotidien qui balance autant d’histoires vraies, ça en devient respectable. J’ai oublié un truc… Vous dire qui je suis ? Vous avez compris que je ne suis pas tout frais, à mon âge y’a plein de choses qui n’ont plus la même importance, la coquetterie par exemple… Je suis un célibataire bourru, et foutrement heureux de l’être. Mais si j’ai gardé un brin de tradition me venant de mon père, c’est celle de se présenter comme un homme ! Jean-Claude Coulle ! Pour vous servir, ou pas ! À vous de voir. Par contre, évitez-moi les blagues pourries sur mon patronyme ! Les « Jean-Claude Couilles » je m’en passerai volontiers. Je sais que vous y avez pensé, tout le monde y pense.
Revenons à nos moutons. Des viols, de la barbarie, des meurtres sans queue ni tête, des trucs bien malsains, et surtout des putains d’injustices, ça des injustices y’en a plein ! Du moment qu’on a la force de les lire, y’en a ! Et aujourd’hui, c’est une cuvée de choix… « Un père enferme sa fille dans une machine à laver. » Visiblement, la petite de quatre ans s’est noyée… Tu m’étonnes… Il aurait dû lui apprendre à nager avant… J’aime pas trop les affaires familiales, y’aurait bien quelque chose à faire, mais c’est pas mon dada. Je préfère pas m’en mêler… « Un trentenaire condamné à cinq ans pour la séquestration et le viol d’une jeune adolescente. » Ça devait être un jour de soldes au tribunal ! Avec un peu d’argent et quelques bons bouquins, il ne verra même pas le temps passer… Le coupable est un « marginal », sympa comme qualificatif. Moi ça me fait penser au film de Belmondo. Pourtant, viol et séquestration, c’est un autre registre… J’évite en général d’imaginer la scène, mais j’arrive jamais vraiment à m’en empêcher. La gamine qui crie, qui demande de l’aide, qui appelle sa mère, qui hurle pitié, pendant que l’autre détraqué s’acharne sur elle encore et encore… Faut vraiment pas avoir d’âme… Ça ne s’explique pas… Je découpe l’article, il me servira peut-être d’ici quelque temps. Je pourrais rester des heures assis à lire ces saloperies, mais va falloir qu’on décolle. C’est l’heure du boulot.
Je prends soin de ne rien oublier, blouse, stéthoscope, badge, sacoche en bandoulière, clés de voiture et on se presse ! Parce qu’on n’est pas en avance. Direction Château-Thierry, dans l’Aisne. Environ deux heures de route, et ne comptez pas sur moi pour faire la conversation.
C’est quand je vois défiler les kilomètres sur l’autoroute que je me rends compte de la somme de travail que représente ce pays. Prenez votre bagnole, choisissez une direction et roulez. Avec de la chance, vous verrez ce que je vois. Pas ce bitume dégueulasse, qu’on a aligné envers et contre tout en défonçant des montagnes, en élevant des ponts gigantesques pour traverser des ruisseaux. Non je parle du vrai travail, celui qui est sur les côtés, ces champs, ce jardin, ces cultures, ce savoir-faire ancestral, qu’on a mis des centaines d’années à concevoir. Je le respecte par-dessus tout, par-dessus moi. C’est ce qui m’a donné envie d’aider ce pays à mon tour.
Par contre ce qui ne vaut pas grand-chose, c’est la voiture que je conduis. Une vieille Peugeot 405 break, en 2010, au mois de décembre ! On a du mal à y croire hein ? Et pourtant… Je l’ai acheté pour le voyage. Mis à part ce bruit bizarre qui sort du pot, et la suspension qui rappelle à mon dos qu’il n’est plus tout jeune, elle roule ! J’avais dit que je ne ferais pas la conversation, mais on est bientôt arrivé, c’est la prochaine sortie.
On va rendre visite à un type que je connais bien, même si lui ne me connait pas encore. Il habite un appartement un peu à l’écart du centre-ville. C’est toujours plus compliqué un appartement. Une maison c’est clos, ça laisse du temps. L’appart c’est une science, une science molle, ça varie, ça bouge, même pendant l’opération, on n’est jamais à l’abri de rien, surtout dans ce genre de résidence. Parlons-en justement, c’est une barre d’immeuble divisée, moitié copropriété classique, moitié dédiée aux séniors. Là, vous me voyez arriver avec ma blouse et mon machin de docteur. Reste plus qu’à garer et attendre que mon zigoto rentre du boulot. Il devrait être là pour 17 h 30, je l’ai assez surveillé pour le savoir.
Le problème numéro un est résolu, y’a de la place sur le parking, ça n’a pas toujours était le cas lors de mes précédentes visites. Mettez-vous à l’aise, parce que là, on coupe le moteur et on attend…
On se réveille ! Il vient de se pointer avec sa berline allemande, l’enculé n’a même pas changé ! En même temps, je le comprends… Elle a l’air géniale cette caisse. Je me suis rigoureusement bien garé, cinq rangés derrière lui, et pile en face. Faut dire que c’était un minimum calculé, j’aurais tiré une sale tronche s’il avait garé juste à ma droite. Je me connais, si ça avait été le cas, j’aurais poussé le vice jusqu’à lui dire bonjour. Mais pour le moment tout va bien, il descend sans se douter de ma présence, et traine sa carcasse graisseuse jusqu’à la porte d’entrée. Parfait ! Dans exactement huit minutes, je dois être là-haut. Je le sais parce qu’il n’ouvre jamais le store de sa cuisine le matin, il le fait seulement après son retour. Ce qui fait qu’entre sa descente de voiture, son passage à la boite aux lettres, et le temps pour se mettre à l’aise une fois chez lui, il met huit minutes. J’attrape mon bric-à-brac, mes gants, et me fais une dernière fois le plan dans ma tête. On est jamais trop prudent…
Le problème numéro deux est plus complexe, je dois traverser le parking sans que personne ne voit mon visage, et même de préférence sans qu’on me remarque. Je me suis foutu mon béret sur la tête, histoire de me couvrir des fenêtres du haut. Pas de digicode pour me ralentir, direction le quatrième. Deux portes par palier, et je sais que les voisins sont encore absents. Je vais quand même parler doucement, ça va l’obliger à faire pareil. C’est parti ! Je toque… doucement aussi.
- Monsieur Hermiont ?
C’est le nom d’un voisin dans l’immeuble d’à côté, celui réservé aux séniors. Ça va le mettre en confiance… Il va ouvrir sans réfléchir… Enfin, j’espère… Je l’entends déjà avec son pas d’éléphant… Il s’approche…
- « Vous vous tromper d’appartement ! » qu’il me lance en zieutant par le judas.
Couillon ! Sois poli, ouvre d’abord la porte… Je regarde autour de moi avec un air surpris, joue la comédie, souffle, en rajoute un peu dans l’agacement. On me filera pas un Oscar c’est certain… Pourtant, c’est suffisant, il tourne le loquet.
Ça s’ouvre… Un sacré gaillard vu de près ! Gros, mais aussi grand que moi et la carrure qui va avec, on dirait un rugbyman à la retraite. Je fonce, je le bouscule presque ! Mais je suis entré, c’est le principal… Le troisième problème est résolu. Je continue à jouer le jeu c’est primordial…
- Monsieur Hermiont votre fille m’a prévenu, vous n’êtes pas content de me voir, mais c’est pour votre bien !
- Non ! Non ! Vous vous êtes trompé d’immeuble, les Hermiont c’est de l’autre côté !
Je sors ma seringue de ma poche, pourvu qu’il ne trouve pas ça suspect… Je m’aperçois que j’étais pressé et que je ne vous ai même pas expliqué la raison de ma présence ici… Et vous ne me le faites même pas remarquer ? C’est bien le moment ! Délicat, mais je me lance…
Il faut remonter à y’a un an et demi, et se replonger dans la rubrique des faits divers. J’ai vu un article casé dans un coin du journal. Un gosse d’à peine seize ans percuté par une voiture sur la route. Sur la route… j’ai envie de rire ! Sur le trottoir ! Le gosse était sur le trottoir ! Il rentrait tranquillement chez lui, il revenait « d’une soirée entre amis » avait écrit ce connard de journaliste. En réalité, il était parti jouer à la console chez l’un de ses camarades. Un fan de jeux de foot, comme des millions à son âge. Le type à la berline allemande, il s’appelle Hassan Maïf, c’est lui le chauffard qui a percuté le petit. Le tout bourré comme un coing, défoncé comme pas permis ! Il s’est livré le surlendemain, quand il a compris qu’un témoin avait vu la scène, identifié sa voiture et que les gendarmes ne tarderaient pas à lui passer les bracelets. Pas con le gars ! Au contraire, il a joué ses meilleures cartes : regrets, remords, dépression, cure de désintox, même une expertise de son psy qui disait qu’il avait changé, qu’il n’était pas un danger pour la société. Résultat ? Cinq ans avec sursis, dont deux ans fermes. Avec la bonté de notre système judiciaire, il ne verrait jamais l’intérieur d’une cellule.