"Le Crous de Poitiers expérimente dans ses restaurants universitaires une formule où les étudiants composent leurs menus. Les syndicats craignent des économies dans le dos des étudiants.
Les étudiants connaissaient déjà le permis de conduire probatoire et ses 6 points. La même formule ou presque s’applique désormais à leur repas au Crous de Poitiers. Depuis la rentrée, le menu à points est expérimenté dans le restaurant universitaire situé à deux pas du Futuroscope ainsi qu’à Niort et à Châtellerault. Le même dispositif devrait essaimer à Angoulême et à La Rochelle en septembre 2025. Chaque étudiant peut composer son plateau « selon ses envies » en additionnant ses points : 1 ou 2 pour une entrée, autant pour un dessert et 4,5 ou 6 points pour un plat principal. Autrement dit : opter pour six propositions à 1 point ou… une seule, plus conséquente, à 6 points. Un point supplémentaire peut être ajouté pour 0,55€. Le tarif réellement facturé à la caisse reste, lui, inchangé : 3,30€ 1 euro pour les étudiants boursiers. Selon le Crous de Poitiers, ce menu à points offrirait « plus de flexibilité » aux jeunes libres de « choisir » et de « se faire plaisir ».
« Auparavant, ils ne pouvaient pas prendre deux entrées ou deux desserts. Avec cette formule, ils prennent ce qu’ils veulent du moment que ça ne dépasse pas 6 points », explique Frédéric Storz, le directeur du restaurant universitaire poitevin. Au passage, le Crous de Poitiers a trouvé une solution pour maîtriser les coûts des matières premières. « Avec l’augmentation du prix des denrées, certains produits plus qualitatifs comme l’avocat ne pouvaient plus être proposés. Ce menu à points nous permet de les mettre à nouveau sur les plateaux », avance Arnaud Vinet, le directeur de la communication du Crous de Poitiers qui rappelle le prix de revient d’un repas : « Près de 9 euros ».
« 46 % des étudiants sautent déjà un repas par jour, faute de moyens. »
Frédéric Storz se réjouit désormais de proposer « un steak frais, cuit à la minute » et bientôt « du faux-filet ». Tous trois étudiants, Clément, Simon et Jean-Brice approuvent : « Ça évite le gaspillage et c’est abordable ! » Matthieu et Mathis, eux, tordent le nez : « Maintenant, il faut tout calculer pour prendre une entrée, un plat et un dessert et parvenir à un repas équilibré. Et personne n’a été prévenu avant la rentrée… » Principale organisation étudiante, l’Unef dénonce cette expérimentation qui oblige les étudiants « à faire des choix entre quantité et qualité alimentaire ».
« Les étudiants seront obligés de débourser plus d’argent pour mieux se nourrir. Nous sommes opposés à cette idée », confirme Yann Dubois, étudiant de l’Unef élu au conseil d’administration du Crous de Poitiers. À Lyon où le menu à points existe déjà comme à Marseille ou Clermont-Ferrand, Lucie Coutant confirme cette inquiétude : « Ici, le steak frites est à 6 points. Les étudiants ne choisissent plus ce qu’ils souhaitent réellement manger… 46 % des étudiants sautent déjà un repas par jour, faute de moyens », précise cette vice-présidente de l’Unef.
« Ça nous enlève de quoi manger »
Porte-parole du syndicat Solidaires à Poitiers, Arthur Valois soupçonne le Crous de « réaliser des économies sur le dos des étudiants ». Ce jeune pointe un autre problème : « En fonction des allergies, des restrictions religieuses ou tout simplement des goûts, on peut se retrouver privé d’un plat, voire de plusieurs ! Mathématiquement, ça nous enlève de quoi manger… » Le Crous de Poitiers affirme prendre en compte ces remarques et s’est engagé à plafonner le plat principal végétarien à 4 points. « Plus de 30 % des étudiants sont aujourd’hui végétariens. Et nous n’entendons pas proposer une restauration à deux vitesses mais de qualité », abonde Arnaud Vinet, le directeur de la communication du Crous."
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