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2023-07-03 22:48:50
Ce matin du 27 juin, Adam (son prénom a été changé), 14 ans, est sur le chemin du collège, à Nanterre (Hauts-de-Seine), lorsqu’il croise Nahel, au volant d’une Mercedes Classe A jaune. « Nahel, c’est son grand frère du quartier. Il a tout de suite proposé à mon fils de l’emmener passer les épreuves du brevet », résume le père d’Adam, Georges (son prénom a aussi été changé), rencontré ce lundi à sa sortie du travail, à Saint-Denis. C’est sur la banquette arrière que s’installe Adam, car la place du passager avant est déjà prise par un autre copain de Nahel, qui a 17 ans. « Mon fils ne savait pas que Nahel n’avait pas de permis de conduire, ni qu’il était encore mineur. »
Quand les deux policiers à moto de la DOPC somment la Mercedes de s’arrêter, « Nahel n’a pas voulu s’arrêter », confirme Georges. La voiture est finalement prise dans un embouteillage, et les deux policiers se postent du côté gauche du véhicule. La suite, c’est Adam qui la raconte, par l’intermédiaire d’un texte transmis à notre journal par son père. Il livre une version des faits similaire à celle du passager avant, qui s’est confié au Parisien vendredi. « Mon fils est trop choqué pour s’exprimer. À la maison, il ne parle pas beaucoup des faits », justifie ce chef de chantier installé à Créteil, qui a la garde d’Adam un week-end sur deux.
Selon le récit écrit d’Adam, « les policiers (…) ont pointé leurs armes sur Nahel ». Nahel aurait pris « environ trois » coups, et aurait tenté de « se protéger la tête ». L’un des policiers aurait selon Adam lancé « qu’il allait lui mettre une [balle] dans la tête ». Ensuite, le pied de Nahel aurait « lâché le frein sûrement par panique, en essayant de se protéger ». « La voiture a avancé toute seule. C’était une automatique. Et le policier a dit à son collègue de tirer. Et le coup est parti », ajoute Adam dans son texte.
« Tu n’aurais pas dû tirer », aurait lâché le deuxième policier
Adam raconte avoir d’abord cru que son copain n’avait pas été touché. « Nahel, après avoir reçu la balle, il a dit : C’est un fou, il a tiré. » La Mercedes aurait ensuite « accéléré d’un coup », et Adam a « senti un choc », sans comprendre que le véhicule s’était encastré dans du mobilier urbain, à hauteur de la place Nelson-Mandela. Nahel ne bouge plus. « Il n’y avait pas de sang, mais il était penché sur le côté ». Adam tente d’ouvrir sa portière, mais la « sécurité enfant » est enclenchée. Il parvient finalement à s’extraire du véhicule, et est aussitôt interpellé par l’un des deux motards. « J’ai levé les mains pour qu’il ne me tire pas dessus », poursuit l’adolescent.
« Je me suis retrouvé par terre. J’ai dit (au policier) que je n’avais rien fait, et il m’a dit : Ferme ta gueule. Et il m’a menotté. » Adam est ensuite conduit dans une voiture de police, où il assiste, impuissant, au massage cardiaque pratiqué sur son copain. C’est là qu’il aurait, selon ses dires, entendu le motard qui n’a pas tiré sermonner son binôme. Ce policier lui aurait dit qu’il « n’aurait pas dû tirer, parce qu’ils allaient faire un barrage plus loin ». Ce policier aurait ajouté que « Nahel était mort ». « C’est à ce moment-là que j’ai compris », confie encore l’adolescent.
La garde à vue d’Adam a été levée en début d’après-midi, il y a désormais presque une semaine. Depuis, Adam reste mutique. Il évite de regarder la vidéo des faits, insupportable pour lui. « C’est un gamin. On dirait qu’il ne réalise pas encore. À chaque fois il dit que ça va, mais je connais mon fils, je sais qu’il souffre. Il a des absences. En ce moment il dort super mal », rapporte Georges.
Tout ce que demande la famille, c’est une condamnation du policier qui a « abattu Nahel comme un lapin ». Pessimiste, Georges redoute que « la justice ne passe pas ». « C’est sûr, le policier qui a tué Nahel va finir acquitté. C’est tout le temps comme ça », estime-t-il. Contacté, l’avocat d’Adam et de son père n’a pas souhaité s’exprimer à ce stade.