nuageblanc2000
2022-12-29 21:03:09
Après cinq à la fac de droit à Assas, le choc est saisissant. Pierre découvre qu’ici, l’étudiant est roi, traité comme un client. "Les salles de cours étaient flambant neuves, le matériel informatique de bonne qualité, beaucoup de personnel, et les fauteuils d’amphithéâtre bien molletonnés. Le privé versus le public", résume ce jeune avocat qui vient alors d’intégrer l’Edhec. Bien sûr, il n’intègre pas cette école de commerce pour le décorum de bonne facture mais pour la valeur de ce double cursus...
"C’était une volonté d’élargir mes compétences en vue d’être avocat d’affaires, plus que par impossibilité de trouver du travail à la fin de ma formation universitaire, qui était très bonne", assure-t-il. Seulement, pour ce jeune homme, la fac de droit forme des juristes et des avocats mais ça ne suffit pas. "Pour travailler en entreprise, il faut comprendre les problématiques opérationnelles du client qui a besoin de conseils. En fac, j’étais parfois surpris par le manque de connaissance du monde professionnel qu’avaient certains étudiants tout juste sortis de M2", se rappelle-t-il. Alors à peine entré dans cette école, il choisit la voie de l’apprentissage pour combler le peu de stages effectués durant ses études en fac.
Jouer la complémentarité
Pour Philippe, lui aussi avocat, passer par une business school était indispensable. "Les avocats sont des juristes qui n’ont jamais appris à travailler en équipe et la plupart ne savent pas manager." Pour ce désormais spécialiste de la propriété intellectuelle, la formation en école de commerce permet aussi d'apprendre à se débrouiller et à trouver des solutions à tous les types de problème : "C’est une grande force quand on arrive sur le marché du travail et qu’on intègre un cabinet."
Si cette complémentarité semble pertinente pour des étudiants en droit, elle séduit aussi ceux aux parcours différents. Pour Paloma, la grande école représentait l’internationalisation. Après un magistère de finance à l’université Panthéon-Sorbonne, elle intègre l’Essec et part étudier sur son campus à Singapour. Mais la puissance de la grande école, c’est bien sûr et avant tout le prestige de l’école. "Beaucoup d'entreprises et de banques ont pour prérequis une école du Top 3 (ou 5) souvent explicite dans les annonces. Avoir l’Essec sur mon CV me permet donc de passer les premières étapes de recrutement plus facilement", témoigne la jeune femme. Et d’ajouter : "Dans une grande école, le réseau des anciens élèves est généralement bien mieux entretenu qu’en université, avec un budget dédié. Les événements se succèdent avec des Salons de l’emploi et des conférences métiers. Je me tourne souvent vers les anciens pour m'orienter et avoir des conseils, que ce soit sur le métier, l'entreprise ou sur le processus de recrutement. C'est un coup de pouce pour trouver un stage ou un emploi à la fin de nos études."
Un gros travail est fait pour que les étudiants restent en contact via les réseaux d’alumni notamment. "La marque de l’école est d’ailleurs beaucoup plus prononcée et l’appartenance à une école beaucoup plus importante qu’à l’université", compare Pierre.
"Le choix le plus neutre possible"
Que ce soit Pierre ou Paloma, les deux ne dénigrent pas pour autant leur formation universitaire, dont les connaissances théoriques étaient "irréprochables" et souvent pointues. Seulement, le marché du travail réclame de plus en plus de profils polyvalents avec une attention particulière portée sur les soft skills. Pour Arthur, l’université est trop spécialisée, alors après un DUT en gestion d’entreprise, il choisit, lui aussi, de finir son cursus par l’école de commerce de Grenoble, pour bénéficier d’une formation généraliste. "Ce qui m’intéressait, c’était l’entrepreneuriat. Pour cela, j’avais besoin d’étudier le marketing, la comptabilité, la finance… avoir plusieurs casquettes !"
Nicolas voit son choix pour l’école de commerce d’une façon plus cynique : "Intégrer ce type de formation est probablement le choix le plus neutre, le plus dépassionné mais le plus pragmatique. On connaît les règles du marché de l’emploi alors on joue le jeu…" Un avis partagé par Julia, elle aussi diplômée de l’Edhec après un parcours universitaire : "Avec l’école de commerce, je ne voulais me fermer aucune porte." Ce passeport pour l’emploi est très apprécié des recruteurs : 93% d’entre eux ont une opinion favorable des grandes écoles, d’après la dernière étude Ipsos pour la Conférence des grandes écoles. La preuve : 9 diplômés sur 10 ont un emploi 6 mois après l’obtention de leur diplôme.
Sauter la case classe prépa
Si ce sésame a longtemps impliqué de passer par la laborieuse classe prépa, c’est de moins en moins vrai. Arthur vise l’école de commerce depuis le lycée, il n’a pourtant jamais songé à faire une prépa : "J’avais trop d’exemples de personnes passées par l’université et qui avaient réussi à intégrer une bonne école en fin de parcours." Les chiffres lui donnent raison : plus de la moitié des diplômés des grandes écoles n’ont pas étudié en classe prépa.
De plus, pour ceux qui optent pour la prépa, l’arrivée en école est souvent déroutante. Davantage de travail en groupe et de business case, moins de soirée en solitaire devant son bureau dans une grande émulation neuronale. Mais aussi, moins de profondeur dans les cours, diront certains. Pierre aussi a eu beaucoup plus l’impression de bosser à la fac qu’en école de commerce. "Les cours me semblaient assez vides, comparés à mon master 2 de droit. A mon arrivée dans ce deuxième master, j’ai eu la sensation d’on a tous fait une prépa durant laquelle on a lutté pour réussir le concours, il est normal qu’on se détende en école de commerce", ironise-t-il.
https://start.lesechos.fr/apprendre/universites-ecoles/etudiants-a-luniversite-ils-preferent-finir-leur-cursus-en-ecole-de-commerce-1174766?xtor=CS4-6230&fbclid=IwAR19I7bYMyfGQp3CGWFEF1WQP0-HXbk9IIrznPOx15tAPHOTe4NNNKXUDyI