Mon cher fils,
Depuis six jours nous sommes ici dans le bunker du Fuuhhrer, Papa, tes six frères et sœurs et moi pour mettre fin, de la seule façon honorable qui soit, à notre vie nationale-socialiste.
Je ne sais pas si tu recevras cette lettre. Peut-être le destin me permettra-t-il de t’envoyer mes dernières amitiés. Tu dois savoir que je suis restée ici contre la volonté de ton père qui, dimanche dernier, voulait aider le Fuuhhrer à sortir d’ici. Tu connais ta mère, nous avons le même sang, pour moi il n’y avait aucun autre choix. C’est ici, avec tous, que notre magnifique idéal s’est forgé et c’est ici, aussi, que ma vie durant, j’ai connu tout ce qu’il y avait de plus beau, de plus admirable, de plus noble et de meilleur. La vie dans le monde qui vient après le Fuuuhhrer et le National-Socialisme ne vaut plus la peine d’être vécue, c’est pourquoi j’ai aussi pris les enfants. Ils sont trop bien pour cette vie à venir et Dieu miséricordieux me comprendra, si je leur donne moi-même la délivrance. Tu vas continuer à vivre et je n’ai pour toi qu’une seule requête : n’oublie jamais que tu es un Allemand. Ne fais jamais quoi que ce soit contre l’honneur et dans ta vie, veille à ce que notre mort ne soit pas inutile.
Les enfants sont fantastiques. Ils s’entraident sans aucun soutien dans ces conditions précaires. Malgré qu’ils doivent dormir sur le sol, qu’ils ne puissent se laver, qu’ils n’aient pas à manger, jamais une plainte, jamais de pleurs.
Des impacts ont secoué le bunker. Les plus grands protègent les plus petits et leur présence ici est par là même une bénédiction qui de temps à autre fait sourire le Fuuhhrer.
Hier soir le Fuuhhrer a détaché sa décoration en or du Parti et me l’a épinglée. Je suis fière et heureuse. Dieu, faites qu’il me reste assez de force pour accomplir le plus dur et ultime geste. Nous avons encore un but : fidélité jusqu’à la mort du Fuuhhhrer. Que nous puissions terminer notre vie avec lui est une grâce du destin à laquelle jamais nous n’aurions pu penser.