" [...] le mouvement en faveur de la prolongation de la vie (tout comme la futurologie en général) est le propre reflet de la stagnation de la culture du capitalisme finissant. Il n’est pas une réponse naturelle aux progrès médicaux qui ont prolongé l’espérance de vie. Il provient de l’évolution des relations et des attitudes sociales, entraînant les hommes à perdre tout intérêt pour les jeunes et pour leur postérité, à s’accrocher avec désespoir à leur propre jeunesse, à chercher à tout prix la prolongation de leur propre vie, et à ne s’effacer qu’avec une extrême répugnance devant les nouvelles générations. [...] la crainte du grand âge ne provient pas d’un “culte de la jeunesse”, mais d’un culte du moi. Par son indifférence narcissique à l’avenir des générations futures, et tout autant par sa vision grandiose d’une utopie technologique sans vieillesse, le mouvement pour la prolongation de la vie est un bon exemple du fantasme de “pouvoir absolu et sadique” qui, selon Kohut, imprègne si profondément la vision du monde de Narcisse. L’inspiration et les origines psychologiques de ce mouvement sont pathologiques comme est superstitieuse sa foi dans le salut par la médecine : il exprime, sous une forme caractéristique, les angoisses d’une culture qui croit n’avoir d’avenir.