Lorsque nous jetons un bref regard sur les messages du forum tout en feignant ne pas connaître ses codes, il nous est difficile de ne pas buter sur l'absence de point à la fin de bon nombre phrases, tout particulièrement celles qui ne sont suivies d'aucune autre. Outre le caractère irrégulier de cet usage que nous venons de soulever, celui-ci s'avère d'autant plus atypique qu'il ne concerne qu'un seul signe de la catégorie du point, à savoir celui que nous nommons couramment point, c'est-à-dire le point ponctuant toute phrase déclarative, le type de phrase prédominant de notre langue. Au-delà des forums, nous pouvons aisément constater que la disparition du point semble être quelque chose de très fréquent dans de nombreuses formes de communication électronique moyennant internet. Nous ne pouvons laisser un tel usage imprégner notre langue sans questionner sa légitimé. Pour ce faire, nous devons analyser cet usage et chercher ce qui a entraîné la disparition de l'usage du point afin de savoir si nous sommes en droit de nous défendre lorsqu'une personne n'ayant pas intériorisé les codes de notre forum nous reproche cet usage de substitution que nous nommerons dorénavant usage du non-point.
En prenant le présent forum comme point de départ à notre enquête, nous nous heurtons à un vide lorsque nous cherchons à trouver une raison à la perte de l'usage du point dans un quelconque principe rationnel ou dans une quelconque règle. En effet, l'usage du non-point, tout en étant incorrect selon les règles grammaticales qui régissent notre langue, ne semble pas plus être justifiable rationnellement au vu de la forme de communication qu'est le forum. Ce dernier semble à première vue emprunter autant à la messagerie instantanée qu'au courriel, faisant de lui une forme bâtarde de communication. Sur un forum, nous échangeons généralement des messages pour engager une discussion directe, comme dans une messagerie instantanée, à la différence près que, sur un forum, il nous est nécessaire de rafraîchir la page pour suivre l'évolution de la conversation. Il découle de cette absence d'instantanéité qu'un message de forum est un message complet et fermé. Il est rédigé de telle sorte que nous n'ayons plus rien à rajouter par la suite, sinon l'interlocuteur risquerait de nous répondre sans avoir lu la suite du message ou la modification de celui-ci. En cela, le forum se rapproche plus du courriel dans la façon qu'a l'utilisateur de formuler ses messages, la différence ne résidant que dans les usages dérivés des coutumes d'utilisation propres à chacune des deux formes de communication.
Alors que l'usage du point est de rigueur dans le cadre du courriel, cela ne semble pas être le cas dans le cadre du forum dont les utilisateurs semblent privilégier l'usage du non-point, de même que les utilisateurs de la messagerie instantanée. Cette dernière et le forum ayant en commun, comme nous l'avons dit précédemment, la discussion, nous pouvons esquisser la déduction selon laquelle l'usage du non-point serait lié au principe de discussion que nous n'avons jusqu'ici mentionné que brièvement, sans y apporter la moindre définition. Ce que j'appelle discussion, c'est l'échange impliquant la simultanéité, à bien distinguer de l'instantanéité qui se rapporte plus à la dimension temporelle de la réception d'un message envoyé par l'interlocuteur qu'à la dimension temporelle de l'engagement de deux personnes dans un même échange. Le forum permet ainsi la discussion, c'est-à-dire l'engagement simultané de deux personnes dans un même échange, ce que ne permet pas le courriel. Nous noterons cependant que dans les forums moins fréquentés que celui qui nous sert de point de départ, à savoir le forum blabla 18-25 ans de jeuxvideo.com, le forum le plus actif de France ; dans les forums moins fréquentés dis-je, la forme des messages semble souvent revenir à un modèle similaire au courriel, incluant notamment des formules de politesse. Dans ce cas-ci, l'utilisation du point est également plus courante que dans les forums plus actifs dans lesquels les utilisateurs sont connectés simultanément et peuvent par la même échanger simultanément, c'est-à-dire discuter. Cela appuie alors la déduction que nous avons esquissée au début de ce paragraphe, celle selon laquelle l'usage du non-point implique généralement une forme de communication qui permet la discussion, et non pas le simple échange de messages interposés dans une forme similaire à celle de la lettre. Cette déduction ne nous donne cependant pas en l'état ce qui constitue l'origine de l'usage du non-point.
Face à ce problème, il nous faut trouver une piste qui nous permettrait de remonter logiquement à l'origine du remplacement de l'usage du point par l'usage du non-point. Cette piste se trouve selon moi dans l'une des justifications les plus couramment invoquées lorsque l'on fait prendre conscience de leur propre usage aux usagers du non-point. Selon un certain nombre d'entre eux, j'entends par là le nombre de ceux qui ont un intellect suffisamment développé pour inventer une justification à leur usage, le point serait trop formel et traduirait une fermeture à la discussion, un comportement distant et froid. Tandis que du point de vue du forum, il nous est difficile de comprendre ce qui a provoqué cette soudaine connotation du point donnant une impression d'indisposition à la conversation à l'interlocuteur, ce n'est pas le cas du point de vue de cette autre forme de communication électronique permettant la discussion qu'est la messagerie instantanée qui, comme nous le verrons par la suite, semble contenir l'origine logique de l'usage du non-point.
La discussion moyennant la messagerie instantanée diffère de celle qui prend place sur le forum par son caractère instantané, c'est-à-dire ce en vertu de quoi chaque message apparaît instantanément à l'interlocuteur et qu'il est impossible à celui-ci de l'ignorer, même lorsqu'il est lui-même en train d'écrire, à moins bien entendu qu'il ne soit un parfait benêt. Ainsi, sachant que l'interlocuteur verra chacun des messages qu'il lui enverra, l'utilisateur de la messagerie instantanée est plus enclin à écrire au fur et à mesure ce qu'il souhaite dire, comme pour simuler une discussion orale, même si nous verrons par la suite que la discussion par messagerie instantanée en est en réalité bien différente. Il est ainsi très fréquent que le discours soit fractionnée en plusieurs messages dans une messagerie instantanée, si bien qu'il n'en devient plus qu'une suite de segments juxtaposés, structurée logiquement selon le bon vouloir de l'utilisateur qui fait de chaque message le porteur d'une idée appartenant à un discours global. Le propos n'est alors plus pensé comme une succession de phrases finies, mais plutôt comme un empilement de segments possédant individuellement une unité syntaxique, qui occupent chacun un message et qui sont toujours reliés sémantiquement au précédent et au suivant, jusqu'à ce que l'on ne soit coupé par l'interlocuteur ou bien que l'on brise nous-même ce flux en ajoutant un message n'ayant aucun lien sémantique avec le précédent. Ce dernier type de rupture n'est généralement pas planifié, c'est pourquoi le message précédent ne contient pas de point. L'interlocuteur doit alors deviner la rupture sémantique, ce qu'il peut faire aisément grâce au caractère instantané de la discussion qui facilite la connaissance de la dimension temporelle de l'échange. Cela lui permet d'avoir l'intuition immédiate du temps que laisse l'individu entre chaque message, et donc de ressentir plus facilement la volonté de rupture sémantique.
Nous pouvons ainsi interpréter une discussion par messagerie instantanée comme un flux de messages potentiellement continu. Reprenons une analogie géométrique que nous avions suggérée plus tôt, mais gardons-nous de faire une association entre le point de cette analogie et le point en tant que signe. Ce que nous avions décrit a posteriori dans le paragraphe précédent comme une suite de segments se comprend dans le présent du flux comme une demi-droite à laquelle on ajoute un point lorsque l'on décide d'envoyer un message qui contient alors le segment de mots que l'on vient de créer. Suite à cet acte d'ajout d'un point à la demi-droite, qui n'est autre que l'acte d'envoi d'un message, nous décidons soit de nous arrêter au segment formé, soit de poursuivre sur cette demi-droite jusqu'à poser un autre point en envoyant un autre message et ainsi de suite. Cette double possibilité qu'offre l'ajout d'un point à la demi-droite, nous l'anticipons au moment de l'envoi du message. Lorsque nous envoyons un message qui devient alors le contenant d'un segment de mots, nous anticipons la possibilité de prolonger ce segment par un autre qui sera lié sémantiquement au premier dans un nouveau message.
Cette anticipation provient de l'avantage considérable qu'offre la discussion par messagerie instantanée par rapport à la discussion orale. Dans cette dernière, il y a une forme d'impossibilité à ce qu'un segment puisse soit être isolé, soit appartenir à une demi-droite qui le prolonge. Lorsque nous nous exprimons à l'oral, nous ne pouvons pas laisser planer le doute sur le fait que nous avons fini de nous exprimer et suggérer que notre propos peut être poursuivi sans qu'il n'y ait d'interruption, puisque tout arrêt dans la parole constitue une interruption, la fin d'une phrase, et que nous sommes forcés de passer à une autre phrase totalement indépendante de la précédente puisque cette dernière disparaît dans la vacuité du passé. Notre répugnance pour le silence, notre mémoire limitée qui nous fait oublier rapidement ce que l'on dit ainsi que notre incapacité à parler en continu à cause du volume d'air que nos poumons peuvent contenir nous empêchent de faire des suites de mots potentiellement continues. Il nous est impossible de laisser en suspend un segment, de le poursuivre par un autre, puis de laisser ce nouveau segment en suspend et ainsi de suite. C'est la raison même pour laquelle la messagerie instantanée laisse place à l'imprévisible. Nous pouvons placer un segment, le laisser en suspend et décider par la suite d'ajouter un autre segment qui lui sera lié sémantiquement, ce qui poursuit cette espèce phrase que l'on peut dire indéterminée, ou alors de marquer un arrêt et d'attendre que l'interlocuteur brise de lui-même le flux en répondant.
Tandis que le point pourrait être interprété comme une invitation à prendre la parole pour l'interlocuteur, il produit en fait l'effet inverse. Comme nous l'avons vu précédemment, le propos dans une discussion par messagerie instantanée suit généralement le schéma d'une sorte de phrase indéterminée. Le point délimitant justement la phrase, il en brise le caractère indéterminé. Lorsque l'on place un point, nous refusons de fait l'éventualité de poursuivre la phrase indéterminée par un nouveau message. En mettant des points à la fin des segments de mots qui constituent nos messages, nous faisons de ces segments des phrases, et non plus une même phrase indéterminée. Le point évoque l'intention de finir, et non plus l'ouverture à la possibilité de continuer. C'est précisément cela qui donne l'impression à l'interlocuteur que l'on essaye à tout prix de mettre fin à la conversation lorsque l'on met des points à nos phrases. L'usage du non-point devenant la norme de politesse, le point devient à l'inverse le moyen de montrer expressément que l'on est fermé à la conversation, et il est utilisé de cette façon par certaines personnes, souvent du sexe féminin par ailleurs. Nous pouvons ainsi dresser le constat que l'usage du non-point est né d'une adaptation au caractère instantané de la discussion par messagerie instantanée. Nous pouvons également dresser un autre constat qui est que parallèlement à l'usage du non-point, une connotation du point est née.
Alors que l'usage du non-point en discussion ne devrait logiquement se limiter qu'à la discussion présentant un caractère instantané, nous constatons qu'il s'est retrouvé projeté à de nombreuses autres formes de discussion par communication électronique. En effet, parallèlement à cet usage est née la connotation du point comme nous l'avons vu précédemment, et c'est de cette connotation du point que les utilisateurs de messageries instantanées ne se sont pas défaits. Alors qu'il n'y a plus de raison à l'existence de l'usage non-point quand la discussion prend place dans un forum, un moyen de communication ne présentant pas le caractère instantané de la messagerie instantanée, cet usage reste maintenu à cause de la connotation déracinée du point. La raison de l'existence de l'usage du non-point étant indépendante de la connotation du point qui est née parallèlement à cet usage, son existence n'est plus justifiée par un quelconque principe rationnel lorsqu'elle dépasse le cadre des communications écrites instantanées. Ainsi, l'usage du non-point en forum ne pouvant pas être justifié par un principe rationnel ou par une règle, aucun utilisateur du non-point ne peut défendre cet usage qui n'est que le fruit de sa propre erreur. À l'inverse, les utilisateurs du forum qui appliquent la règle du point sont parfaitement en droit de signifier que l'absence de points à la fin des phrases est incorrecte, et que le fait de mettre des points à la fin de ses phrases est un impératif que tous se doivent de respecter.
D'aucuns se verront à moitié convaincus de la réalité si évidente à tout esprit sain de cet impératif, mais cela ne fait pas disparaître en l'état la connotation que le point a prise au plus profond de leur esprit. Seul un travail sur soi couplé à du temps et de la pratique peut y remédier. Il convient cependant, afin d'aider ces futurs repentis du non-point, de lancer un assaut impitoyable sur les excuses toutes plus absurdes les unes les autres qu'avancent les usagers du non-point lorsque l'impératif de l'usage point s'impose à eux.
Première excuse : « Le smiley/sticker fait office de ponctuation. »
Le smiley/sticker ne peut pas remplacer le point, même si nous pouvons déduire visuellement du smiley/sticker le sens du point. Le signe est soumis à la fonction de sa catégorie. Par exemple, "" est un signe qui a un sens, il fait partie de la catégorie du smiley qui a pour fonction de véhiculer des sentiments, des émotions, et ce en reproduisant un visage. La fonction du smiley n'a pas été déduite de son usage, c'est l'usage du smiley qui émane de la fonction. Par la nécessité de véhiculer les sentiments, nous avons commencé à utiliser le smiley qui est donc conditionné par sa fonction. Chaque signe étant ainsi lié à la fonction de sa catégorie, il convient alors d'utiliser d'une part le point de la catégorie du même nom qui a pour fonction de ponctuer et d'indiquer le type de la phrase, puis d'autre part le smiley de la catégorie du même nom qui a pour fonction de véhiculer un sentiment. Une simple déduction visuelle d'un signe pour un sens en dehors de la fonction de la catégorie à laquelle il appartient ne serait qu'une déduction faite du signe, mais pas en tant qu'il est signe, car il est signe selon la fonction qui conditionne l'existence de sa catégorie. Nous ne pouvons pas nous baser sur autre chose que le sens des signes pouvant être contenu naturellement en eux-mêmes pour un langage.
Autrement dit : l'interprétation du sens du signe peut varier selon la communauté, selon l'individu, mais ce sens ne peut pas aller au-delà de la fonction de sa catégorie. "" peut être interprété comme un sourire gentil ou un sourire méchant, selon notre appartenance aux forums blabla ou non, mais il ne pourra jamais être interprété rationnellement comme ayant le sens du point, c'est-à-dire le sens de fermeture de la phrase déclarative. Cette interprétation ne viendrait pas du signe en tant qu'il est signe, mais du signe en tant qu'il est une simple information visuelle.
Deuxième excuse : c'est à vous de me l'apporter sur ce topic.
Ta prof de Kaka yuga -> sélection par la chiasse
Ta reacprout ?
Le 10 novembre 2021 à 21:25:29 :
Ta prof de Kaka yuga -> sélection par la chiassehttps://image.noelshack.com/fichiers/2021/11/2/1615919766-image-removebg-preview.png
Ta reacprout ?https://image.noelshack.com/fichiers/2021/11/2/1615919766-image-removebg-preview.png
Persoent ------> Prout
oh la vache ce pavé
radiohead est un groupe infame nonobstant, que ce soit en angleterre ou en ardèche
Ok.
C'est pas faux