Monsieur le Président de la République,
Je vous propose un débat public sur la politique étrangère de la France. En effet, le moment soulève de nombreux défis cruciaux qui peinent à être perçus ou à entrer dans la sphère d’intérêt médiatique. Pourtant la période actuelle est si riche de ruptures et de recompositions dans l’ordre international ! Les conséquences du changement climatique vont considérablement bouleverser les équilibres entre les Nations et entre les peuples. La détérioration des grands cycles naturels dont nous dépendons pose à l’Humanité la question de ses biens communs et de la manière de les gérer. La première puissance mondiale, les Etats-Unis d’Amérique, est entrée dans une phase de déclin. Elle met alors toute son énergie pour contenir et combattre l’émergence de puissances capables de concurrencer son hégémonie monétaire, commerciale, économique ou militaire. En Europe, un débat existe sur le continent à propos du rapport à entretenir avec la Russie ou la Chine.
La France doit répondre à tous ces sujets. Son territoire est présent sur cinq continents et son domaine maritime est le deuxième le plus important du monde. Elle est présente aux deux pôles et elle est le pays méditerranéen d’Europe le plus peuplé. La France fait partie du groupe des 5 Etats du monde à siéger de façon permanente au Conseil de Sécurité des Nations unies et des 8 à posséder l’arme nucléaire. Sa responsabilité dans la marche du monde est engagée. Elle ne peut pas négliger les bouleversements géopolitiques de son époque. Elle doit prendre position. Mais il y a plusieurs façons de le faire. Chacune est sous-tendue par des doctrines et des visions différentes concernant notre patrie et le monde. Vos choix et engagements forment un ensemble qui plaide sa cohérence. Vous admettez qu’ils nous impliquent tous. Un débat a donc sa place pour confronter les différentes propositions possibles. Je crois qu’il s’agit d’une nécessité d’intérêt général. C’est pourquoi je vous propose ce débat public. Il aurait le mérite de capter l’attention et l’intérêt de nos compatriotes. L’actualité des relations de la France avec le bloc anglo-saxon ou avec le Maghreb y pousse. Mais également par exemple les tribulations du projet d’Europe de la défense, quelques mois avant votre entrée en fonction à la présidence de l’Union européenne.
Mon point de vue a l’intérêt d’être opposé au votre sur nombre des questions d’actualité. C’est donc la garantie d’une discussion argumentée et approfondie. Par exemple je ne suis pas d’accord pour que la France participe à des exercices militaires aux côtés des Etats-Unis et de ses alliés dans la zone indo-pacifique. Cette politique de montée des tensions et d’intimidation de la Chine n’est selon moi pas conforme aux intérêts de notre pays. Je suis également contre la décision d’installer le centre spatial de l’OTAN en France, à Toulouse. Je crois que la course aux armements dans l’espace, la position et la stratégie française pour y répondre devraient pouvoir être discutées. Enfin, je suis un opposant à notre présence militaire sans fin, sans objectifs de guerre et sans stratégie de sortie dans plusieurs Etats du Sahel.
Ce sont quelques exemples mais il y en aurait beaucoup d’autres. Au fond, ce qui se joue, c’est l’indépendance des Français et donc leur liberté. Comme républicain, il me coûte de voir ces questions si capitales pour l’avenir de notre peuple le plus souvent confinées dans des cénacles d’experts. Je souhaite que tout le monde puisse se faire une opinion éclairée. Un débat public est la solution la plus facile à organiser. Le président Mitterrand en avait accepté un avec le député Phillipe Seguin à propos du traité de Maastricht. Une opposition de même ampleur nous sépare. En République, l’affrontement public d’idées contradictoires n’est jamais un problème, mais une solution.
Avec mes meilleures salutations républicaines,