Zergod
2021-04-23 19:42:59
Les religions orientales qui, à la fin de la République et au début de l'Empire, se propagèrent à Rome et dans les provinces occidentales, véhiculaient des idées totalement différentes des croyances romaines.
Les cultes orientaux avaient été apportés, à l'époque républicaine, par les voyageurs, marchands, mais surtout par les esclaves. Eunus, chef de la première révolte servile de Sicile (v. 136-132 av. JC), dut beaucoup de son charisme au fait qu'il se disait le protégé de la déesse syrienne Atargatis. Par ailleurs, les affranchissements massifs, l'immigration due aux échanges commerciaux feront naître, dans les grandes villes, des communautés qui diffuseront ces cultes. La sécurité des axes de communications facilitera la circulation des idées.
Sous la République, cette invasion des dieux étrangers inquiétait les partisans de la vieille religion romaine. Ceux-ci accusaient les fidèles des nouveaux cultes de se livrer à des actes criminels. En 186 av. JC, le Sénat engagea un procès monstre contre les adeptes des Bacchanales (cérémonie en l'honneur de Bacchus, divinité mi-grecque, mi-orientale) et il prononça 3 000 condamnations à mort (rapporté par Tite-Live et l’inscription portant sur le décret sénatorial concernant les Bacchanales découverte en 1640 en Calabre).
Sous l'Empire, la pratique du culte impérial était un gage de fidélité à l'empereur. L'introduction de religions orientales fut tout d'abord perçue comme une remise en cause des fondements de l'État.
La religion traditionnelle avait longtemps suffi à une communauté agricole simple. Sous l'Empire, elle ne satisfait plus les aspirations d'une société cosmopolite. Beaucoup préféraient souvent à la veille religion romaine les religions orientales d'Asie Mineure, de Syrie et d'Égypte. Les cultes orientaux faisaient directement appel aux sentiments des fidèles, leur promettant l'immortalité et le salut dans un autre monde en récompense de leur foi. La conversion passait par des rites d'initiation et la révélation de mystères réservés à un groupe privilégié. Les cérémonies de purification, les repas rituels, la souffrance comme moyen de pénitence y tenaient une place importante. Les cérémonies accompagnées de chants et de musique contrastaient avec la froideur du culte romain.
Les cultes à mystères furent donc de plus en plus populaires. Je vous présente quelques cultes comme les cultes phrygiens de Cybèle et de Sabazios, de l'égyptienne Isis ou encore du perse Mithra, avec illustrations
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Le premier culte oriental établi à Rome fut celui de Cybèle, originaire de Phrygie et introduit par le Sénat en 204 av. JC, une prophétie affirmant qu'elle aiderait Rome contre Hannibal. Divinité de la terre, elle était souvent représentée dans un char tiré par des lions, car elle était aussi la protectrice des animaux. Son compagnon, le dieu de la végétation Attis, meurt et renaît avec les saisons. Il était l'objet d'un culte orgiastique. Durant la cérémonie du taurobolium emprunté au culte de Cybèle, on égorgeait ou transperçait le cœur d’un taureau avec un glaive au-dessus d'une fosse où se tenait le fidèle ; le sang devait lui rendre sa pureté originelle.
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Ce bas-relief élevé, sans doute à la fin du IIe siècle par une fidèle de Cybèle, Claudia Synthyché, montre le vaisseau amenait l'effigie de la déesse.
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Relief représentant un archigallus, un grand prêtre de Cybèle en robe de cérémonie entouré de ses attributs. Cette religion mystique était célébrée par des prêtres eunuques, les galli, qui se mutilaient volontairement au cours de danses sacrées et de flagellations. Au début, les Romains s'effrayèrent de ce nouveau culte qu'ils avaient eux-mêmes introduit. Jusqu'à l'Empire, les citoyens romains furent exclus des cérémonies et des prêtrises de Cybèle.
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Originaire de la Perse, le culte du dieu perse Mithra se répandit dans l'Empire au Ier siècle par l'Asie Mineure, d'où les légions romaines l'apportèrent en Occident. Divinité de lumière, Mithra lutte sans fin contre Ahriman, le prince des ténèbres. Dieu nourrisseur, on le représentait égorgeant un taureau dont le sang fécondait la terre. Ce sacrifice se déroulait dans une grotte, ce qui explique les chapelles mithraïques souterraines telle celle de l'église San-Clément à Rome. Culte guerrier, le mithraïsme était particulièrement populaire dans l'armée qui contribua beaucoup à sa diffusion (par exemple en Gaule et dans les vallées du Rhône et du Rhin). Son clergé, très hiérarchisé, enseignait une morale de loyauté, de discipline et de courage physique et moral.
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Les cérémonies en l'honneur de Mithra avaient lieu dans des sanctuaires souterrains : celui-ci a été découvert à Rome, sous la très vieille église de Saint-Clément.
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Un dieu syrien. Monté sur un taureau la main droite tenant un foudre et l'autre une hache aujourd'hui brisée, ce dieu syrien a été assimilé à Jupiter (Jupiter Dolichenus).
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Anubis, le dieu égyptien à tête de chacal, sur une pierre tombale provenant des catacombes de Kom el-Shoqafa à Alexandrie. Dieu funéraire, il est ici habillé en soldat romain. Sous le nom d' "Anubis aboyant", Virgile en fit l'une des divinités monstrueuses qui protégeaient Antoine et Cléopâtre contre les dieux traditionnels de Rome protecteurs de leur adversaire, Octave.
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Sabazios, divinité phrygienne, était assimilé à Jupiter ou à Dionysos, et parfois confondu avec Attis. Certains objets, telle cette main votive couverte de signes du Zodiaque et faisant un signe de bénédiction, sont caractéristiques de ce culte.
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Le culte d'Isis et de son parèdre Osiris-Sérapis étaient une version hellénisée d'une ancienne religion égyptienne qui s'était propagée à la période hellénistique. Familier aux Pompéiens en 100 av. JC, il avait été introduit à Rome sous Sylla. Il fut officialisé par Caligula qui fit bâtir un temple à Isis au Champs de Mars. Isis, symbolisait la création, concevait son fils Horus sur le corps d'Osiris, mort et ressuscité. Cette peinture représentant une cérémonie en l'honneur de la déesse égyptienne Isis, provient d'Herculanum. Au haut de l'escalier, entre un prêtre et une prêtresse qui agitent des sistres (instruments métalliques dont le bruit devait écarter les démons), le Grand Prêtre d'Isis, vêtu de lin blanc, présente aux fidèles une urne qui contient de l'eau sacrée. Au pied de l'escalier, un appariteur, la baguette à la main, semble régler la cérémonie. Plus bas, un prêtre attise avec un soufflet la flamme d'un autel ; à droite, un homme assis joue de la flûte. Les ibis évoquent les paysages d'Égypte.