kheyousaler3
2021-03-16 00:00:48
Désormais les hommes marchent piètrement vers ces sites ridicules, comme des moins que rien, fragilisés par la compétition visuelle dans laquelle ils s’apprêtent à se lancer, ils perdent leur temps à choisir la bonne photo, l'unique, la belle, celle qui leur permettra d'entrer dans la course, la course vers une grande misère du désir, ou l'humain n'est plus que pathétique produit de consommation, une coquille vide et rigide, un apparat vain et sans fond.
Après avoir perdu des heures à soigner votre triste image et à élaborer une présentation faiblarde, ponctuée d'humour grossier, en somme : à ériger le monument du fantôme que vous êtes devenus, vous entamerez une conversation avec une fille peu cultivée, très vaguement attirante et couverte d'un maquillage grossier, étalé sans ménagement sur sa peau vulgaire...puis seulement à cet instant certains me diront "et bien alors, peu importe c'est juste pour niker" niker...mais c'est bien dans cette phrase que l'on visualise, en un éclair fugace, la médiocrité qui fait maintenant partie intégrante de votre être, la médiocrité et l'immédiat : les pales et rigides fers de lance de notre société actuelle. Cette société et ses froids diktats, pour lesquels vous vous êtes données corps et âmes, sans effroi, vous, l'homme 2.0
Et c'est ainsi qu'après une discussion burlesque et prévisible, désertique de par son manque de surprise, sous un prétexte maladroit et à peine masqué, l'un finira chez l'autre, pour enfin réaliser le but premier et ultime de cette triste rencontre : baiser, baiser mécaniquement, comme des pauvres animaux, blessés à vif par leurs vieux amours déchus. Et baiser, c'est en effet ce que vous allez faire de façon faussement précipitée, sans aucun charme ni passion, des va et viens seront platement exécutés, et peu à peu l'excitation trompeuse des premières minutes laissera vite place à une effrayante et glacial monotonie, il y aura quelques changements de position afin de faire perdurer l'illusion qu'existe encore un minimum de sens concret dans votre acte vain, quelques mots convenus et dénués d'érotisme véritable seront mollement lancés, et sous d'acres odeurs corporelles, le tout s'effectuera jusqu'à jouir brièvement dans un meuglement ridicule.
Puis, une fois vos testicules bien vides, asséchés et pendantes, viendra à vous l'évidence que vous êtes tristement méprisable, cette fille assise dans votre lit, vous inspirera tout à coup un dégoût immédiat et profond, vous n'avez aucune envie de la prendre dans vos bras bien qu'elle le demande ardemment, en réalité vous la frapperiez presque, tant elle incarne l'étonnant reflet de tout ce que vous avez d'honteux, d'obscène, de touts ces qualificatifs, qui ont menés vos pas fragiles, hésitants, vers son chemin de chair et d'espoirs défaits.
Oh quelle clarté qui surgit...vous saisissez enfin du bout des doigts la vanité de vos actes, vos actes et vos pulsions primaires balayés dans ce vif éclair brut et objectif qui vite implose chez vous, il monte tout à coup...de plus en plus. Et éclate en un grand nuage amer. Amertume oh vous le jurez, plus jamais, vous le promettez. Plus jamais.
Jusqu'à ce que vos maigres couilles ne se remplissent peu à peu, obstruant un peu plus chaque jour, votre tangible estime personnelle, et c'est alors que l'histoire se répétera avec une autre femme implacablement; encore et encore, tout cela dans un cycle infernal et sans fin, au sein duquel vous vous êtes vous même jetés, sourire au lèvres et cœur battant, les bras tendus vers le néant.
Tinder, regroupement de coquilles vides et de couilles pleines.