Avant-propos
Bonjour à toutes les kheyettes et tous les kheys.
C'est aujourd'hui à moi, je pense, de partager mon histoire.
Non pas qu'elle soit forcément intéressante pour tout le monde, j'ignore même si elle sera très longue.
J'espère cependant qu'elle pourra aider celles et ceux qui, plus nombreux qu'on ne le pense, ont souffert ou souffrent encore du même mal que celui dont j'ai été victime de longues années.
Pour moi, tout cela est désormais terminé.
Ce risitas est une sorte d'exutoire pour purger la douleur, les questionnements et les doutes qui m'ont habité pendant tout ce temps, jusqu'à la délivrance.
Cela sera aussi le compte-rendu d'une expérience partagée par peu de monde.
J'attends vos remarques, vos avis. Tout a déjà été rédigé à l'avance, je m'interroge seulement sur la fréquence de parution, sachant qu'il y a 10 chapitres plus un épilogue. Faites moi savoir vos préférences.
Bonne lecture mes khoyas.
Chapitre 1 : Le mal en moi
Nous sommes au cœur du mois de juillet 2013, il est 6h du matin, et aujourd'hui je vais peut-être mourir.
Ainsi pensé-je alors que cette splendide journée estivale commençait à peine.
Encore couché dans mon lit d'hôpital sentant la blanchisserie, j'entendais au loin, dans les couloirs, le bruissement des pas des infirmières et de leurs conversations.
Malgré la paix des lieux, malgré le coin de ciel bleu visible par la large fenêtre, mon esprit était troublé par des pensées terribles.
Je ne pouvais cesser de m'interroger sur le sens de mon existence et sur les événements m'ayant conduit là où j'étais à ce moment précis.
Flashback.
Tout avait pourtant bien commencé. Une enfance heureuse dans une famille aimante et loin du besoin m'avaient amené à devenir un jeune homme relativement épanoui.
Malgré les désagréments de la vie de tout enfant, de tout adolescent, et évidemment de tout jeune homme, j'étais parvenu à me faire une place, certes discrète, dans ce monde de brutes laissant tant d'âmes sur le côté. Quelques copines, des amis : le rêve de beaucoup.
Pourtant, une ombre noire planait sur mon âme tourmentée, un secret si profond que personne, pas même mes parents, pas même mes frères et sœurs, pas même mes plus proches amis, ne pouvaient suspecter.
J'avais toujours été différent. Tout jeune déjà, j'avais remarqué que mon corps n'était pas comme celui de mes camarades, sans que cela n'éveille le moindre soupçon en moi. Douce naïveté enfantine que je regretterai amèrement plusieurs années plus tard.
Ce mal qui me rongeait peut paraître anodin à certains. Ce n'est pas une véritable blessure, pas un moignon arboré suite à un accident, pas une balafre acquise au combat des tranchées.
C'est une simple déformation. Un défaut de conception, invisible sous les vêtements, mais qui, une fois remarqué, ne peut plus être ignoré.
Je souffre en fait d'une déformation du thorax nommée pectus excavatum, signifiant concrètement que j'ai un "creux dans le thorax". Oui, un creux. Cela est difficile à expliquer alors voici une photographie, trouvée sur internet.
Bien entendu, je ne connais lors de ces années d'adolescence pas le nom de cette déformation. Pour moi, c'est mon "creux".
Le pectus excavatum est une déformation du thorax induite par le développement trop important des cartilages autour du sternum. En raison de cette croissance anormale, le sternum peut soit ressortir en avant (pectus carinatum) ou en s'enfonçant, comme ce fut mon cas et comme la majorité des victimes de cette affliction. Dans la plupart des cas, cette déformation est bénigne, mais elle peut parfois poser plus de soucis, en raison de la compression du cœur dans un espace plus restreint, mais aussi diminuer les capacités respiratoires.
Petit enfant, jamais je n'avais remarqué cette incongruité. Mon torse me paraissait normal et personne ne m'avait jamais fait de remarques, que ce soit dans le cadre familial, ou même encore à la piscine à l'école primaire.
Sur les photos de moi bébé, puis enfant, peu de traces de ce creux.
Je me souviens encore des jeux auxquels je me livrais : faire une petite piscine d'eau sur mon torse, jouer au tam-tam sur l'os.
C'est à l'adolescence que tout a changé, et que cette insouciance a volé en éclats.
Comme tous les kheys ici présents, l'épreuve des vestiaires m'a été imposée. Face à Jean-Muscu et son torse déjà bien dessiné, je faisais pâle figure mais n'étais toujours pas préoccupé outre mesure par mon torse.
Personne n'aime la piscine au lycée, l'adolescent déteste montrer son corps. Nous tentons tous plus ou moins de masquer nos parties intimes de peur des moqueries, mais moi suis plus préoccupé par ce thorax qui commence à intriguer certains.
C'est mon meilleur ami qui me porte le plus rude coup, en voyant sans doute pour la première fois mon torse si particulier :
- La vache, il est super enfoncé ton thorax !
Cette remarque, qui peut sembler idiote et anodine, fait l'effet d'une bombe en moi, c'est une littérale
Je commence dès lors ma descente en enfer car, transi de honte face à ma différence, prenant conscience que non seulement mon creux est visible mais qu'il fait aussi réagir lorsqu'il est remarqué, je m'enferme dans mes pensées et dans des vêtements ne laissant plus rien paraître.
Adieu T-shirts, chemises, débardeurs, bonjour pulls et doudounes.
Je regarde en boucle ces mêmes photos d'enfance où par le passé, rien ne me sautait aux yeux. Je le vois partout, ce creux me nargue de sa présence. Je le hais, je me hais.
Il va sans dire qu'à cette époque, malgré quelques amourettes, je suis encore puceau. Je le resterai encore de nombreuses années. Impossible, mentalement, de montrer mon corps à qui que ce soit. Plus de piscine, plus de plage, plus de bronzage, et surtout, plus de copines.
Moi, Quasimodo des temps modernes, vécut plusieurs années renfermé sur moi-même, jusqu'à ce qu'un jour, la Providence vienne me porter secours.
Sweet ?
Merci les kheys je ne sais pas quelle fréquence adopter pour la publication, des avis ?
dès qu'il y a un "sweet" tu balances la suite, c'est comme ça ici khey
l'important c'est d'être régulier
Mais si tu peux pondre 2 chapitre par jour je dis pas non
Chapitre 2 : Aide-toi, le Ciel t'aidera
Le baccalauréat en poche, j'intègre l'université près de chez moi.
Solitaire, je vis toujours chez mes parents et entretiens ma pucellerie au niveau mage noir.
Mes études ne me plaisent pas, et mes quelques amis ne me permettent pas de remonter la pente pour devenir un yes life.
C'est pourtant au cours de ces premières années universitaires que les choses basculèrent dans le bon sens.
Vous tous qui me lisez savez qu'Internet est un lieu magique où l'on peut presque tout trouver, des recettes de cuisine aux plans de fabrication d'une bombe.
Membre de JVC sous un autre pseudo en 2011, je navigue alors sur les blablas, quand je vois tout à coup un topic attirant mon attention.
Un récit, parfois poignant, d'un khey ayant souffert du même mal que moi. Merci
Aujourd'hui disparu, ce topic relatait en fait le processus par lequel il était passé pour faire disparaître le creux : l'opération.
Il y décrivait la procédure suivie, mais également les suites. Je dois bien avouer avoir eu peur car les mentions de douleurs insoutenables, la perte de poids étaient nombreuses.
Ainsi donc, cette déformation pouvait disparaître !
Cependant, passer sur le billard me faisait très peur, moi qui, anxieux de base et très complexé, avait déjà du mal à acheter une baguette de pain.
Je dévorai ce topic malheureusement éphémère et transitai sur Internet à la rechercher des réponses dont j'avais tant besoin.
De page en page, de Wikipédia en sites souvent anglais, je découvrais la vérité : je n'étais pas seul. Des milliers, des millions de gens partageaient ma douleur. J'apprends que les hommes sont les plus touchés, à hauteur de 1% de la population. Je découvre que certains cas sont pires que les miens.
Quelle est l'origine de la déformation ? Génétique ? Environnement ? On ne sait pas, mais on suspecte des antécédents familiaux.
Je me mets à m'interroger sur toute ma famille, mais les imaginer torse nus est un peu malaisant.
Je repense aux photos de mon papi pendant la guerre. Pas lui.
Je revois mon père à la plage. Pas lui.
Je vois ma mère en maillot de bain. Pas elle.
Mais qui ? Qui est responsable de cette malédiction ?
Je cherchais un coupable idéal à défaut d'avoir une solution.
Mon creux mesure en effet 7 cm de large sur 3 de profondeur, quand certains ont parfois plus de 5 cm de profondeur !
C'est terrible à dire, mais savoir que quelqu'un souffre plus que moi me fait du bien.
Je tombe sur un nouveau forum entièrement dédié à ce problème. On y parle des opérations.
Il existe deux principales opérations pour cela : casser entièrement la cage thoracique et la reconstruire sur de nouvelles bases, ou insérer une barre en titane pour redresser le creux.
Dans le premier cas, il s'agit d'une opération lourde et très douloureuse laissant une large cicatrice sur le thorax.
Dans le second cas, la procédure est plus douce, quoique douloureuse, et laisse une cicatrice assez petite de chaque côté du torse, sous les aisselles, là où la barre est insérée. De plus, cette barre peut être enlevée après trois ans par une simple opération ambulatoire.
Plusieurs sujets abordent les limitations induites par l'opération : plus de manèges à sensations fortes, éviter les chocs...Moi qui rêvait à cette époque de devenir pilote de ligne, je découvre que cela risque d'être compliqué, car le niveau physique exigé est haut.
Un rêve de gosse qui s'effondre, mais cela n'ébranle pas ma détermination grandissante.
Un autre topic. Une liste de noms : ce sont des chirurgiens. Vais-je franchir le pas ? J'ai certes 20 ans, je suis donc théoriquement libre de mon corps, mais je vis encore chez mes parents et ceux-ci ne se doutent pas de ce que je vis, et ce que j'envisage.
Pourtant, je repense à ma douleur. La honte de mon corps. Les moqueries. Ni une, ni deux, je note sur un papier les coordonnées d'un des chirurgiens les plus proches et contacte le secrétariat.
Il faut savoir que je développe pendant mon adolescence, probablement poussé en cela par mes complexes physiques, une phobie sociale qui s'étend à l'usage du téléphone. Je parviens pourtant à prendre un rendez-vous en mars avec le chirurgien.
Mes parents ne l'apprendront que quelques semaines avant, dans une effusion de cris et de larmes.
Mais avant cela, avant même le rendez-vous ultime avec le chirurgien, une première étape m'attend : j'ai besoin d'une lettre de recommandation de mon médecin traitant.
Bordel de merde. Il faut toujours compliquer les choses dans ce pays !
Le rendez-vous pris, sans en avertir mes parents, je me rends au cabinet.
- Bonjour jeune homme, qu'est-ce qui vous amène ? Dit-il en souriant.
- Euh… eh bien…
Je connaissais à peine ce type et je n'arrivais pas à aligner deux mots. Il fallait que je me reprenne, que je pose mes corones sur la table.
- Je viens vous voir car je pense avoir besoin d'une opération, et ai besoin d'une lettre de votre part.
- Quel genre d'opération ? Dit-il surpris.
- Au thorax, j'ai quelque chose qui s'appelle pectus excavatum d'après mes recherches sur internet.
- Cela ne me dit rien, répondit-il.
Même le médecin ne connaît pas ce truc !
- Enlevez votre maillot, ajouta-t-il.
Je m'exécutai, lui révélant ce que j'avais passé des années à masquer.
- Mmmh, oui effectivement, dit-il après un court moment. J'ai déjà vu plusieurs de mes patients avec ce genre de creux, je ne savais pas qu'on pouvait l'opérer.
- Moi non plus jusqu'à récemment, répondis-je. Pouvez-vous me faire la lettre ?
- Bien sûr, si vous êtes certain de le faire.
- Je n'ai jamais été aussi déterminé.
C'était une première victoire pour moi. J'avais vaincu le premier mini-boss du donjon.
Il s'agissait de mon premier pas sur un long sentier semé de difficultés, dont le dénouement final m'emplit d'une terreur sourde.
Le 02 juin 2017 à 21:23:20 Poulpoz a écrit :
Ca doit être chaud d'avoir ca
Oui, mais c'est plus mental que physique dans la plupart des cas
sweet khey
Chapitre 3 : Le sentier des larmes
Nous sommes en février, et le rendez-vous est en mars. Je n'ai pas mon permis et suis donc obligé de m'y faire conduire.
Je pourrais demander à un ami, certes, mais je ne pourrais d'une part lui avouer pour quelle raison je dois me faire conduire si loin de chez moi, et j'ai d'autre part besoin de la présence rassurante de mes parents dans cette épreuve.
En plus, me connaissant, j'ai peur de me perdre dans l'hôpital, dont je ne connais absolument pas le fonctionnement.
Je dois donc m'y résoudre : parler avec mes parents de mon problème est inévitable. Ils auraient de toute manière fini par l'apprendre, ne serait-ce parce que je me serais absenté pour l'opération.
Quand on garde une telle anxiété, une telle honte en soi pendant des années, à l'insu de tous et même de ses proches, dévoiler la vérité est une véritable épreuve de force.
Je prends la décision de parler à mes parents lors d'un souper.
- Célestin, à table ! me dit ma mère.
- J'arrive, répondis-je, angoissé.
Mes parents sont à table. Le cœur battant, je m'approche de la table. Je revois encore la scène comme si j'y étais : la lumière jaunâtre de l'ampoule, les volets fermés, la casserole posée sur la table, le chien assis par terre en attente d'une bouchée de nourriture qui ne viendra pas.
Je m'installe à ma place. Je me sens mal, j'ai l'estomac noué par la peur, mais parviens à avaler quelques gorgées. Le repas se passe normalement, et passé le dessert, je profite d'un silence pour prendre la parole.
- Maman, papa, j'ai.. j'ai besoin de vous parler.. de quelque chose d'important..
Mes parents se regardent interloqués, se demandant ce qu'il se passe.
- Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais il y a quelque chose qui n'est pas complètement normal chez moi.. dans mon corps.
- Comment ça, qu'est-ce que tu veux dire ?
Les larmes me montent aux yeux. Je vois dans les yeux de ma mère l'inquiétude poindre.
Mon père est impassible.
- N'avez-vous jamais remarqué quelque chose sur mon torse ?
- Ton torse ? Mais non enfin, de quoi parles-tu ? répondit-elle, sonnée.
- J'ai un creux au thorax, lançais-je dans un soupir. J'ai fait des recherches, c'est une déformation qui s'appelle pectus excavatum. Il y a pas mal de personnes qui en souffrent, dont moi.
- Je n'ai jamais rien remarqué, souffla ma mère.
Mon père, quant à lui, le visage dur, ne dit rien.
- C'est une déformation qui se fait à cause du sternum, et ce n'est vraiment pas beau.
- Et pourquoi nous parles-tu de ça ? Qu'est-ce qui ne va pas ? Cela te fait mal ?
Je n'avais jamais véritablement ressenti de douleurs dans le thorax. Quelques rares fois, peut-être une dizaine dans ma vie, j'avais ressenti une sorte de pincement dans la poitrine. Je décidai d'user de cet argument.
- J'ai parfois ressenti quelques douleurs dans la poitrine, et je pense qu'elles sont le fait de mon sternum enfoncé. Mais c'est surtout parce que... j'ai honte de mon corps. Je n'ose plus me montrer. J'ai tellement honte, achevais-je ma phrase, les larmes aux yeux.
Ma mère ne retint pas les siennes non plus, et je poursuivis, la voix enrouée, cahotante au gré de mes sanglots.
- Je veux me faire opérer. J'ai cherché l'adresse d'un chirurgien et ai déjà pris rendez-vous. Le mois prochain. Est-ce que vous pouvez m'y emmener. j'ai besoin de vous.
Si tout se passait bien, malgré les larmes, jusque là, les choses basculèrent d'un moment à l'autre lorsque mon père prit la parole. Lui et moi avions des difficultés d'entente. Deux caractères semble-t-il incompatibles, deux lions en cage s'attaquant pour tout et rien.
La dispute éclata si rapidement que je ne puis aujourd'hui dire les mots exacts qui furent prononcés, je reconstruis donc ici l'échange.
- Qu'est-ce que tu nous racontes encore là, Célestin !? Tu nous fais encore un cinéma, c'est pas possible avec toi, c'est toujours le mélodrame ! Arrête un peu de te plaindre et sors de ta chambre ! éructa-t-il.
- Tu ne comprends donc pas ce que je vis ! Ce que je ressens ! Mais quel genre de père es-tu ?! hurlai-je.
Ma mère assista à l'échange bouche bée, les yeux toujours embués.
Je me levai de ma chaise vivement, et dans un geste théâtral, levai mon polo pour dévoiler la raison de mes tourments, la marque de ma souffrance, mon secret le mieux gardé.
Ma mère comprit immédiatement. Je ne peux dire comment je le sus, mais ses yeux montrèrent un étonnement sincère. Jamais elle n'avait su ce que je vivais et découvrait ébahie ma déformation.
Mon père ne le prit pas de la même manière.
- Ce n'est RIEN ! hurla-t-il. RIEN. Tu fais un cinéma pour rien, c'est quelque chose de normal !
- Ce n'est RIEN ? répondis-je. Sais-tu ce que c'est de vivre avec ça ? Est-ce que tu ne vois rien ? Approche-toi ! Touche-le si tu veux ! Ose me dire en face que c'est quelque chose de normal ! Tu ne sais rien de ce que c'est, tu n'as jamais cherché à me comprendre, JAMAIS ! finis-je en hurlant tellement que ma voix se grippa.
Ma mère fondit en larmes alors que mon père reprit la parole avec une expression de rage.
- Ce n'est pas une déformation. C'est parce que tu te tiens voûté devant ton écran toute la journée, c'est tout.
- Ah oui, j'oubliais que tu sais tout mieux que tout le monde, répondis-je sur un ton moqueur. Un expert en tout !
- Arrête de te tenir voûté et tout ira mieux, répondit-il simplement.
- Non ! répondis-je avec violence. Je dois me faire opérer pour faire disparaître ce creux !
Se levant vivement, mon père enfila son manteau et partit dans le garage. Quelques minutes plus tard, le son du moteur nous parvint. Il était parti.
J'apprendrai plus tard qu'il fit un grand tour en voiture pour faire baisser la tension, pour réfléchir à ce qui avait été dit, pour encaisser le choc.
Si, sur le moment, je le haïssais plus que tout à l'exception de mon creux, je ne peux aujourd'hui que comprendre sa détresse face à une annonce aussi choquante. Savoir que son fils souffre d'une déformation, le voir se dévoiler devant soi pour prouver sa douleur, apprendre qu'il est prêt à risquer une opération lourde pour résoudre le problème, cela fait un choc.
Malgré tout au moment de la dispute, dans mon for intérieur, s'est forgée l'idée qu'il s'est senti coupable de m'avoir transmis cette déformation qui me gêne tant, et le rend responsable.
Cela minera notre relation plusieurs années.
Je partis m'enfermer, suite à ces cris, dans la salle de bain, laissant ma mère seule dans la cuisine, en larmes.
Maman. Toi seule me comprenais à ce moment. Je ressentais un tel sentiment d'amour pour elle à ce moment, le seul être sur Terre qui puisse me comprendre, mais je ne pouvais me résoudre à aller pleurer dans ses bras, à rajouter des larmes aux larmes, et la laissai.
J'enfilai un pyjama et parti me coucher, les yeux rouges, et m'endormis d'un sommeil sans rêves.
Dans la nuit, mon père revint les idées plus claires, et discuta avec ma mère.
Le lendemain, la crise passée, nous rediscutâmes plus posément de la situation, et la décision fut prise : nous irions tous les trois au rendez-vous, dans le plus grand secret.
Khey moi aussi j'ai un pectus excavatum mais honnêtement perso je m'en bas les couilles
Mais je peux comprendre que ca affecte certaines personnes , les " LOL t'a un creux " etc dans les vestiaires je connais aussi
Chapitre 4 : Le grand départ
Vous avez sans doute déjà remarqué cette bizarrerie du temps. Quand un événement enviable est prévu, le temps passe lentement. Quand vous le redoutez, l'horloge tourne dix fois plus vite.
Le mois entre la révélation à mes parents et le départ pour le rendez-vous passa donc avec une vitesse surprenante et nous partîmes en cette belle journée de mars en direction de l'hôpital.
Silence de mort dans la voiture. Impression d'être dans un cortège funéraire.
Les paysages de Lorraine défilent sous mes yeux. A la lumière du printemps, les champs et les forêts resplendissent de couleurs, on sent presque leur parfum jusqu'à la voiture.
Cette description peut vous paraître ridicule mais, dans mon esprit, ce voyage entérinait ma mort éventuelle prématurée.
C'est pourquoi je tentais de ressentir toutes les plus belles émotions possibles à tous les moments imaginables.
Nous sommes originaires d'une petite ville, et la campagne n'est jamais loin de la maison.
Bien entendu, il m'est souvent arrivé d'aller dans de grandes villes, mais cela représente toujours une expérience quand il s'agit d'en découvrir une nouvelle, qui plus est une aussi grande.
Dans un premier temps, nous nous garons près de l'hôpital. C'est une bâtisse majestueuse, immense, avec un porche agrémenté de postes de sécurité. Rien à voir avec le petit hôpital qui m'est si familier.
Pendant le voyage, tout le monde était resté silencieux, mais la sortie de la voiture a coïncidé avec la reprise des conversations, les commentaires sur la ville.
- Ah ça n'a rien à voir avec chez nous, dit mon père.
- C'est bien vrai, appuya ma mère.
Je hochai la tête, mes pensées étant ailleurs.
Il ne faisait pas particulièrement chaud en ce mois de mars, malgré le soleil, mais l'angoisse me faisait transpirer.
Les aisselles moites, je suivais mes parents à l'intérieur du complexe hospitalier labyrinthique.
Je n'exagère rien : ce truc était juste immense, mêlant bâtiments modernes et anciens, arcades, cloîtres…
Nous arrivons dans la salle d'attente qui nous était désignée, et allons voir la secrétaire.
- Bonjour, que puis-je faire pour vous ?
- Bonjour, dit ma mère, nous avons rendez-vous avec le chirurgien, pour mon fils, à 15h.
- Vous avez vos tickets d'entrée ?
Blanc.
- Des tickets d'entrée ?
- Oui vous en avez besoin pour pouvoir accéder au rendez-vous.
Je n'avais jamais entendu parler de ce genre de système à l'hôpital. On aurait dit le fonctionnement d'une boucherie, ce qui n'était pas particulièrement rassurant pour quelqu'un qui devait se faire opérer !
- Mais maman on est déjà proche de l'heure, on va être en retard ! Dis-je avec angoisse.
- On va y arriver.
Nous nous dirigeâmes avec entrain vers l'accueil où une file d'attente nous était destinée.
Après de longues minutes, nous obtînmes le précieux ticket d'or, et retournâmes vers la première infirmière.
Nous étions juste dans les temps, et à peine installés, on vint nous chercher pour rencontrer le chirurgien.
En entrant dans le grand bureau séparé en deux parties, d'un côté les lieux d'entretien avec les patients, de l'autre pour l'auscultation, je me sentis mal et davantage angoissé.
Le chirurgien était assis derrière son bureau, et se leva pour nous accueillir. Il était petit, grisonnant et un peu bedonnant, mais respirait la classe.
Avec mes mains moites, je dus faire une drôle d'impression.
- Alors, qu'est-ce qui vous amène ici jeune homme ? D'après la lettre de recommandation qui m'a été adressée, vous souhaiteriez vous faire opérer du thorax, c'est bien ça ?
Je déglutis et répondis sobrement :
- Oui monsieur.
Après un bref entretien, puis une auscultation, nous revînmes nous asseoir. Une fois installés, et moi rhabillé, le chirurgien posa une question qui avait tout l'air d'une affirmation :
- Vous avez des problèmes d'anxiété ?
Je ne savais pas quoi répondre, mais il continua.
- Je l'ai vu immédiatement à votre entrée. Vous aviez les joues en feu. Cela s'appelle l'éreutophobie. Cela est sans doute dû à de la timidité, renforcée elle-même par votre déformation thoracique.
J’acquiesçais, ne sachant que répondre. J'avais très peur qu'il me demande si j'avais déjà couché avec une fille, devant mes parents !
Mais il ne le fit pas, à mon grand soulagement.
- Pour en revenir à l'opération, qui devrait d'ailleurs résoudre au moins en partie ce problème, il existe deux méthodes de procéder : la destruction puis la reconstruction complète de la cage thoracique, ou l'insertion d'une barre en titane.
- Je préfère la barre, répondis-je immédiatement, terrifié à l'idée de subir la première opération citée.
- C'est ce qui me paraît le plus adapté à votre cas, me dit-il, voyant le soulagement sur mon visage.
L'infirmière qui était présente avec nous, discrète, nous montra alors un objet métallique en forme de U aplati, très étiré. C'était donc cela que j'allais avoir dans le corps !
- Nous allons insérer cette barre par un côté de votre thorax, puis le glisser jusqu'à l'autre côté. Il sera derrière vos côtes et votre sternum, et poussera celui-ci. De la sorte, votre sternum avancera et comblera ce creux qui vous gêne.
Ma mère intervint :
- Ça a l'air dangereux !
- Toute opération l'est mais, madame, vous pouvez me faire confiance, je suis l'un des pionniers et des meilleurs dans ce type d'opérations.
Mon père demanda quelle était l'origine de la déformation, à quoi le chirurgien lui répondit que c'était très probablement génétique et qu'au moins une personne dans la famille devait souffrir de la même chose. Il ajouta que se montrer torse nu étant une pratique relativement contemporaine, cela a pu passer inaperçu chez une personne relativement âgée.
Inconsciemment, je jubilai car mon père avait la démonstration que j'avais eu raison lors de notre dispute.
- Quand fixons-nous la date ? Dit le chirurgien, me tirant de mes songes éveillés.
Nous réfléchîmes tous ensemble,et nous mirent d'accord pour la mi-juillet.
Quatre mois.
Quatre.
Mois.
Cela résonnait encore dans ma tête lorsque nous retournâmes en voiture vers la maison.
Cette entrevue eut l'avantage de fixer les choses au clair, tant dans mon esprit que dans celui de mes parents. Il ne restait plus qu'à attendre le grand jour.
Le 02 juin 2017 à 21:35:28 Black_Francis a écrit :
Khey moi aussi j'ai un pectus excavatum mais honnêtement perso je m'en bas les couilles
Mais je peux comprendre que ca affecte certaines personnes , les " LOL t'a un creux " etc dans les vestiaires je connais aussi
Ah enfin un khey à creux t'as de la chance de bien le vivre, moi ça me rongeait littéralement. Mais maintenant ça va mieux
Chapitre 5 : Le crépuscule de ma vie
La fin de l'année universitaire était passée à toute vitesse.
J'avais annoncé à mon directeur ma volonté de ne pas poursuivre dans cette voie, à son grand désarroi, et lui expliquai mes raisons.
J'en vins, sans l'avoir voulu, à aborder ma situation médicale. Inquiet, il me demanda :
- J'espère que cette opération n'est pas grave. Je n'ai pas envie de perdre encore un étudiant.
Une étudiante de notre établissement était effectivement décédée quelques mois plus tôt d'une maladie incurable.
- Non, lui répondis-je pour le rassurer, alors que mon esprit hurlait que j'étais en danger de mort.
Le diplôme en poche en juillet, je pus profiter de quelques jours de vacances.
Mais comment se détendre avec un tel horizon ?
Les jours passèrent tel un train au milieu des pâtures de ma campagne, à toute vitesse.
Mes parents avaient prévu, avant l'annonce de l'opération, de partir en vacances. Ils avaient été forcés d'annuler par ma faute et me sentais coupable de les en priver.
Après avoir déposé notre chien dans la famille (je lui fis un câlin d'adieu), nous prîmes la route et arrivâmes sur place, refîmes le même trajet qu'en mars, dans une ambiance bien plus lourde : la canicule montrait le bout de son nez, et de voyage était peut-être le dernier de mon existence.
La chaleur devenait étouffante, mais étant arrivés trop tôt nous dûmes nous balader dans la ville. C'était splendide, beaucoup plus grand et animé que chez nous.
- Oh papa, regarde, un serpent de fer !
- C'est un tramway, fils.
Mes parents devaient loger dans une pension tenue par des bonnes sœurs, avec chambre séparée.
Je m'en voulais encore plus d'avoir gâché leurs vacances.
Les sœurs nous accueillirent et nous offrirent à boire, puis me demandèrent pour quelle opération je venais.
- Le Seigneur vous garde mon enfant, dit l'une d'elles.
- Merci ma sœur, répondis-je.
Puis, les valises montées dans les chambres, nous repartîmes vers l'hôpital. Ayant prévu le coup, nous allâmes chercher notre ticket et annoncer notre arrivée.
On me guida dans le dédale des couloirs vers ma chambre.
C'était une chambre individuelle. J'avais craint de me retrouver avec quelqu'un d'autre mais Dieu merci, je serai seul.
J'avais besoin d'introspection.
Cela peut paraître ridicule d'agir comme si l'on allait mourir, de dire au revoir aux êtres et au lieux qui nous sont chers, mais dans ces moments je me sentais à la frontière de la mort, comme si je marchais sur le fil du miroir, au milieu du vide.
Ma chambre était relativement confortable, un lit médicalisé, table de chevet et armoire, une grande fenêtre et la salle de bain.
Nous étions le soir et mes parents étaient encore présents quand le chirurgien vint me rencontrer avec ses assistants pour mettre les dernières choses au point.
Puis vint le moment fatidique, le départ de mes parents.
- Bon, et bien nous allons devoir y aller mon chéri, dit ma mère les yeux embués.
J'eus du mal à rester impassible, mais je devais rester fort. Si les choses devaient mal tourner, je voulais que la dernière image qu'ils aient de moi soit celle d'une jeune homme déterminé et fort, pas celui d'une lavette.
- Je vous aime, dis-je en sentant couler une larme sur ma joue.
Tant pis pour la virilité.
Je les pris tous deux dans les bras et les regardai partir de la chambre.
J'étais maintenant seul, et une infirmière me rejoint quelques instants plus tard.
- Bon, il va falloir vous raser maintenant.
- Pardon, dis-je ? Je me suis rasé la barbe ce matin.
- Je ne parle pas de votre barbe, il faut vous raser les aisselles, le torse, puis prendre une douche de Bétadine.
- J'ai oublié mon rasoir, dis-je, espérant y échapper.
- Il y a un rasoir électrique dans la salle de bains. Allez-y maintenant et n'oubliez pas la douche !
- Oui oui, j'y vais, répondis-je, agacé.
J'avais sué comme un cochon à cause de la chaleur et du stress et elle pensait que j'allais oublier de me doucher ?
Arrivé dans la petite salle de bain modèle hôtel Formule 1, je vis le rasoir et me dénudai.
J'entrepris l'épilation de mon corps viril, retirai les poils de mes aisselles, sans oublier ceux de mes tétons.
Cela fait, je pris ma douche et m'enduis de Bétadine, produit servant à éliminer, selon mes souvenirs, les risques de malades nosocomiales.
J'enfilai mon pyjama et m'installai sur le lit. Mais je ne pouvais pas dormir, il était tôt, et dans mon état je voyais venir la nuit blanche.
Je m'installai alors dans le fauteuil à côté et pris un livre que j'avais emporté : Coeurs perdus en Atlantide de Stephen King, un recueil de nouvelles.
Je le lis d'un œil distrait, mes pensées étant bien loin des histoires rocambolesques des personnages de King.
A 22h, une infirmière vint vérifier que je dormais, et s'insurgea de me voir encore éveillé :
- Vous devez vous lever tôt demain, il faut dormir !
- Je ne peux pas, je suis angoissé madame ! Répondis-je agacé. Et j'ai faim !
- Vous devez être à jeun pour demain. Je vais vous chercher des calmants, dit-elle, partant en grommelant.
Elle revint avec deux petites pilules et un verre d'eau et me regarda les avaler en m'étranglant.
- Merci, dis-je, pensant que j'aurais dû infiltrer des chips dans cet asile de fous.
- Couchez-vous et éteignez-la lumière. Bonne nuit.
Elle se prenait pour ma mère celle-là.
Malgré les cachets, je sentais toujours la panique dans mes veines, et ne sentis pourtant pas le sommeil tomber sur moi tel un rideau de théâtre sur la scène de ma vie.
MDR MOI JE FAISAIS DES SOUPES DANS MON CREU JE RAJOUTAIS DU GRUYERE RAPE JE ME COUCHAIS ET JE MANGEAIS COMME CA EN REGARDANT LA TV AVEC UNE CUILLERE MDR NO FAKE