NoBan78
2024-01-25 10:47:18
Les dix maîtres à penser du national-libéralisme
Edmund Burke (1729-1797). Dans ses Réflexions sur la révolution de France, publiées en novembre 1790, Burke dénonçait l’esprit de système des révolutionnaires français et prédisait, avec une lucidité géniale, la cascade de catastrophes qui allait suivre. Défenseur des traditions, des préjugés légitimes, du respect dû à l’enseignement des ancêtres contre le pseudo-rationalisme des idéologues de la révolution, les soi-disant « philoophes des Lumières », le penseur irlandais est l’initiateur et l’inspirateur du courant contre-révolutionnaire, conservateur ou traditionaliste qui va se développer au XIXe siècle. Mais il ne tombe pas, quant à lui, dans l’obscurantisme et l’irrationalisme d’un Joseph de Maistre : il fait une critique rationnelle du pseudo-rationalisme. Très attaché aux libertés économiques il est lié à Adam Smith , ce libéral conservateur est le précurseur de Hayek. Sa conception de l’homme n’est pas moins intéressante, quand il écrit, par exemple : « L’art est la nature de l’homme ».
Hippolyte Taine (1828-1893). Philosophe, historien et critique d’art français, cet immense auteur a fait justice de la mythologie révolutionnaire dans Les Origines de la France contemporaine, en montrant aussi que la dialectique jacobine était déjà en germe dans certaines tendances pseudo-rationalistes de l’esprit classique. Dans sa Philosophie de l’art, il fait voir dans l’œuvre des artistes le miroir de l’âme populaire, nous dirions : de l’identité nationale. Dans l’introduction à son Histoire de la littérature anglaise, il établit une distinction capitale entre la « race », le « milieu » et le « moment », qui permet de comprendre la société humaine comme un système bioculturel (voir, sur ce point, le livre d’Henry de Lesquen et du Club del’Horloge, La Politique du vivant).
Gustave Le Bon (1841-1931). Fondateur de la psychologie des foules, ce savant français, puissamment original dans les domaines les plus variés, a fait ressortir le rôle des phénomènes irrationnels dans la vie collective. Il a eu de nombreux disciples, tant parmi les hommes politiques comme le général de Gaulle , qui ont mis ses conceptions en pratique, que parmi les sociologues, comme Gabriel de Tarde, et, à travers celui-ci, l’ensemble des théoriciens qui ont réfléchi à la fonction des media dans les sociétés modernes. Le Bon a mis aussi en lumière la grande stabilité de la mentalité collective, de l’âme des peuples. À ce titre, il faut voir en lui l’un des principaux analystes de la notion d’identité.
Vilfredo Pareto (1848-1923). Économiste et sociologue italien, Pareto a traité de l’étude des faits sociaux avec une extrême rigueur et lui a donné une méthode objective qui fait apparaître les vices intellectuels des idéologies inauthentiques de la gauche. Dans un ouvrage publié en 1902 et 1903, il démontre que les divers « systèmes socialistes » reposent sur des hypothèses arbitraires et des raisonnements sophistiques, qui tiennent, pour une large part, à la confusion des mots employés. Sous des apparences scientifiques, le socialisme est un ersatz de religion. Plus généralement, Pareto distingue, dans son Traité de sociologie générale, les « résidus », souvent contraires à la raison, qui sont le fond des phénomènes sociaux, et ceux-ci, qui en sont les « dérivées », qui en procèdent par « dérivation ». Une pensée politique qui veut prendre conscience de ses présupposés ne peut ignorer Pareto.
Ludwig von Mises (1881-1973). Ce grand économiste, théoricien des questions monétaires, est un des plus éminents représentants de l’école autrichienne d’économie politique, fondée par Carl Menger et Eugen von Bœhm-Bawerk, et illustrée après lui par Friedrich-August von Hayek. Mises fut le premier à démontrer, dans un article publié en 1920, que « le socialisme ne marchait pas ». En effet, en l’absence de marché des capitaux, il n’existe aucun moyen, pour l’autorité centrale chargée de la planification, d’établir la valeur des biens de production. Son analyse de l’interventionnisme, du dirigisme, de la bureaucratie est aussi très pertinente.
Bien qu’il ne soit pas un « libertarien » à proprement parler, puisqu’il admet la nécessité de l’État, Mises est cependant un libéral utopique, étranger aux considérations qui dépassent le strict individualisme. Sa conception de l’homme et de la société ne peut donc être acceptée (voir sur ce point, dans le livre du Club de l’Horloge, L’Identité de la France, le chapitre « Libéralisme national ou libéralisme utopique »). Mais les excès mêmes de cette vision ultra-libérale ont une valeur heuristique, en faisant apparaître qu’il y a souvent des solutions privées à des problèmes qu’on a l’habitude de confier à l’État.
Carl Schmitt (1888-1985). Ce grand politiste allemand a montré que l’« ennemi » la reconnaissance de l’ennemi, la distinction de l’ami et de l’ennemi était le critère du politique et lui assurait un domaine propre, de même que le sacré est le critère de la religion, le beau celui de l’art, etc.. Les conceptions de Carl Schmitt sont fondamentales pour juger des choix stratégiques.
Friedrich-August von Hayek (1899-1992). Économiste et philosophe autrichien, disciple de Mises, Hayek a obtenu le prix Nobel de sciences économiques en 1974. Étendant les méthodes utilisées en économie par l’école autrichienne, il montre la fonction irremplaçable des institutions et des traditions dans une société complexe. Il dénonce, sous le nom de « constructivisme », l’illusion pseudo-rationaliste de ceux qui prétendent édifier une société parfaite en faisant table rase du passé.
Konrad Lorenz (1903-1989). Considéré comme le fondateur de l’éthologie branche de la biologie qui étudie le comportement animal et humain , ce savant autrichien reçut le prix Nobel de médecine et de physiologie en 1973. Il a mis en évidence la richesse et la puissance des instincts sous-jacents dans l’action humaine, qui sont paradoxalement à l’origine de la liberté, en raison du potentiel énergétique qu’ils contiennent. L’éthologie réfute aussi bien le « comportementalisme » (behaviorism) de Watson, lequel niait les instincts, que la psychanalyse de Freud, qui faisait tout dériver de la sexualité.
Jacques Monod (1910-1976). Biologiste français, prix Nobel de médecine et de physiologie en 1965, Jacques Monod a déchiffré le code génétique. Dans Le Hasard et la nécessité, il a montré que le « postulat d’objectivité de la nature », qui est le fondement de toute démarche authentiquement scientifique, était incompatible avec le marxisme et que celui-ci pouvait être regardé, en conséquence, comme un animisme, c’est-à-dire comme une superstition. Il est permis, cependant, de ne pas suivre Monod dans ses penchants réductionnistes, lorsqu’il extrapole ses conclusions épistémologiques pour nier la transcendance.
Julien Freund (1921-1993). Politologue et philosophe français, disciple de Carl Schmitt, Julien Freund est le grand théoricien de la chose politique, qu’il a décrite dans ses diverses dimensions, en refusant toute complaisance envers les idéologies inauthentiques de la gauche.