La troisième démarche est due à l'initiative des femmes, de toutes les femmes : elles mettent à leur tête la mère et la femme de Coriolan, prennent avec elles leurs enfants, substance de Rome, et vont en cortège au camp ennemi. Devant son fils, dit Dion Cassius (Zonoras, VII 6),
Véturia déchira son vêtement et, tendant les mains et se touchant le ventre : « Tiens, mon enfant, dit-elle, voici le ventre qui t'a enfanté et les seins qui t'ont nourri ! » Quand elle eut prononcé ces mots, l'épouse de Coriolan, ses enfants, les autres femmes poussèrent des gémissements de deuil…
Et Tite-Live compose ainsi le discours de la matrone (II, 40, 6-8) :
« Tu ne peux ravager cette terre qui t'a enfanté, qui t'a nourri […] Et la haine menaçante, la colère qui t'emportaient ne sont pas tombées quand tu as pénétré sur ce sol ? En voyant Rome, tu ne t'es pas dit : à l'intérieur de ces murs, il y a ma maison, il y a mes Pénates, ma mère, ma femme, mes enfants ? […] Ah ! Si je n'avais pas accouché, Rome ne serait pas assiégée… »
Les femmes réussissent là où les consulaires et les prêtres ont échoué. Coriolan ordonne la retraite et, s'abandonnant à la vindicte des Volsques, disparaît de l'histoire. Rome est sauvée et les matrones établissent le culte de la Fortune des Femmes.
Les rôles fonctionnels se distribuent ainsi. La fonction guerrière de Rome subsiste, triomphe même, mais hors de Rome et contre Rome, et seulement dans la personne de son meilleur général devenu chef des ennemis ; ce qu'elle conserve dans Rome même de uires est insignifiant. Mais il lui reste, intactes, incarnées dans de bons représentants, la première fonction et la troisième. Elles interviennent successivement. La première déploie sans résultat ses deux aspects : d'abord l'aspect politique, souverain, c'est-à-dire, à défaut des magistrats en exercice, leurs plus honorables prédécesseurs ; puis l'aspect religieux, c'est-à-dire la totalité des prêtres, avec leurs ornements et leurs instruments sacrés. Ultime espoir, la troisième fonction met en ligne les agents même de la durée physiologique de Rome, les femmes avec les enfants, et, devant elles, la mère, la femme et les enfants de Coriolan.
(Georges Dumézil, Esquisses de mythologie, Apollon Sonore et autres essais, Histoires romaines, De Méléagre à Coriolan, Manchecourt, 2003, p. 191 sq)
Mais non monsieur préfère une explication Wikipédia sur « la montée en puissance des femmes dans les principautés italiennes » alors même que cela n'explique en rien pourquoi la mort de la Reine n'entraîne pas de défaite, alors que la mort du Roi si