sanek_
2020-03-26 22:29:46
Partie 15 :
La brume se dissipa, le laissant aux prises avec un abominable mal de crâne. Il découvrit avec horreur ses poignets, ligotés par une écharpe aux barreaux d'un lit, et ses chevilles liées ensembles.
- Eh, connasse, libère moi ! beugla Julien.
Il entendit des voix derrières la porte.
- Libérez moi bande de connards !
Il s'époumona encore et encore mais la porte restait close. Julien tira sur l'écharpe, ignorant la morsure du tissu et son bras meurtri, agita les jambes, propulsa son corps à en faire sauter le lit mais les noeuds tinrent bon.
La vicieuse gamine avait bien fait les choses. Il pensa à Louise, certainement inquiète, détruite à l'idée qu'il l'ait trahi et soit parti sans elle. Julien hurla. C'était injuste ! Il cracha sur l'un des posters de Muse et se relança dans une série de menaces macabres, de plus en plus originales.
Sa gorge sèche et son crâne douloureux finirent par le faire taire. Il perdit la notion du temps et s'endormit, vaincu.
Un pincement sur son bras le ramena dans le cauchemar de la réalité. Une petite tête brune l'observait avec curiosité.
- Tu as soif ? demanda l'enfant en approchant un verre.
Julien hocha la tête et s'étouffa à moitié. L'eau qui n'avait pas inondé ses poumons se répandit sur son pull.
- Mer-merci... Ta soeur, elle est là ?
- Non, elle est sortie.
- Ah, et tu veux bien me détacher ?
Le petit garçon, penaud, fit une moue boudeuse.
- Non, Chloé m'a dit de pas rentrer dans sa chambre, que tu étais un méchant !
- Mais non, attends, comment tu t'appelles, viens ici, reviens ici sale trou du cul ! Reviens ou je te massacre !
Il disparut en fermant la porte, laissant Julien se lamenter sur sa propre stupidité. Un homme de fer ? Il en rit nerveusement.
L'obscurité arriva et Julien fut plongé dans le noir total, toujours ligoté, à la merci des caprices d'une gamine qui le rendait responsable de la mort de sa mère.
- Mais les héros ne survivent pas ! marmonna-t-il dans un demi-sommeil.
Les brides d'une conversation animée lui parvinrent mais le jeune homme n'écoutait pas, bercé par la douleur pulsatile de son crâne et anesthésié par la déshydratation.
Lorsque la porte s'ouvrit, la lumière d'une torche l'aveugla. SA torche.
La voix lui était familière. Son coeur bondit dans sa poitrine. Louise !
- Qu'est-ce t'en penses Chloé, on le laisse mariner encore un peu ?
- Je ne sais pas, t'es sûre qu'il essayera pas de nous faire du mal ?
- Il a quand même dit beaucoup de grossièreté, fit remarquer le petit garçon.
L'adolescente approcha la torche et il détourna les yeux.
- On pourrait voter ?
- Oui, un vote !
L'enfant jubilait.
Julien, l'esprit ralenti, découvrait avec stupeur l'étrange public qui délibérerait de son avenir.
- Je vote contre car t'es un idiot, Julien !
- Louise putain, qu'est ce que tu fais !
Elle lui adressa un doigt d'honneur.
- Je vote contre aussi, il nous a attaqué au marteau.
- Contre aussi, il a dit qu'il voulait me massacrer !
Julien ne put se contenir.
- Sale petite merdeux !
- Julien ! C'est un enfant ! Fait pas attention Noé, Julien dit beaucoup de chose qu'il ne pense pas, beaucoup de choses. Des choses vilaines et de très belles, mais il ne les pense pas !
La torche se braqua sur un visage rond et asymétrique, celui qu'il redoutait par dessus tout.
- Je vo-vote... pour...
Il la remercia silencieusement. L'aurait-elle soutenu si elle se souvenait... ? Peut-être que le Dieu des fourbes veillait sur lui ?
- Trois voix contre une, désolé mon chéri, souffla sa colocataire, narquoise.
Mon chéri. Deux mots qui suffirent à accélérer son coeur et lui envoyer une agréable décharge le long de sa colonne.
- Désserez au moins l'écharpe, je ne sens plus mes doigts !
- Non, tu vas t'échapper ! piailla l'enfant pour qui tout cela était très divertissant.
Julien n'allait pas supplier ni perdre le peu de salive qui lui restait pour les convaincre. Louise finirait pas le détacher, le temps jouait pour lui, comme toujours. Le Fer s'effaçait derrière un nuage d'Argon, inerte, indifférent à la faim, la soif et l'humiliation.
Une nouvelle forme s'ajouta dans pièce. Cela faisait beaucoup de monde à l'admirer, ligoté sur ce putain de lit.
- Oh, c'est toi Gérard, mon doux Gérard...
Des mains squelettiques lui grattèrent le front et Julien roula sur le côté. Sa tentative de fuite amusa visiblement Louise.
- Gérard, mon Gérard, pourquoi tu ne m'appelles plus ?
- Mamie, dit Noé, c'est pas tonton. C'est Julien !
- Ah ? Julien, le fils de Bernadette ? Comme il a grandi !
Chloé ordonna à son petit frère de l'emmener ailleurs et ferma la porte derrière eux.
- Julien, commença Louise, je te libère si tu me promets une chose...
Du chantage ? Toute cette mise en scène pour en arriver là ? Il l'ignora royalement.
- Leur mère, elle est morte pour nous protéger...
- Je sais ou tu veux en venir et c'est NON. Garde-moi ici autant que tu veux, j'en ai rien à foutre.
Même dans le noir, Julien pouvait sentir les grands yeux bleus de Louise le mitrailler.
- On va régler ça, dit-elle en s'installant sur ses jambes ankylosées. Laissez-nous les filles, je ne serai pas longue. Et lui non plus.
Son haleine, chaude et mentholée, fit fondre sa colère. Elle déposa un baiser sur son front, le coin de ses lèvres sèches et son cou. Chloé était repartie avec la torche. Dans le noir absolu, il était la plus volontaire des victimes.
- J'ai cru que tu t'étais tiré, murmura Louise en remontant son pull, comme tous les autres salauds. Je voulais mourir, Julien, je t'ai détesté...
Son souffle chaud lui chatouillait maintenant le ventre.
- Et puis Chloé est arrivée, elle est maligne cette petite. Elle m'a parlé d'abord de sa mère, et puis du reste de la famille. Et de toi. Elle était désespéré, terrorisée...
Ses doigts habiles lui retirèrent la ceinture. Julien respirait à peine.
- J'ai compris que tu ne m'avais pas abandonné, que tu voulais seulement me protéger...
Il se souleva pour l'aider à descendre son pantalon. A ce stade, son corps fatigué devait trancher : s'irriguer correctement le cerveau pour raisonner Louise ou capituler à l'appel du désir.
- Je tiens à toi Julien, je sais que tu seras là pour moi, et nous serons là pour eux...
Le caleçon rejoignit ses chevilles. Et son cerveau décida de se saborder.
L'Argon, à bonne température, finissait lui-même par céder aux instincts primitifs de la matière, devenant aussi réactif que le sexe de Julien en cet instant.
Le souffle de Louise venait de l'atteindre, y déclenchant les prémices d'un feu incontrôlable. Julien lui aurait juré n'importe quoi, prêt à toutes les concessions possibles. Il n'eut pas honte de sa faiblesse. Au jeu du pouvoir, les femmes l'emportaient toujours depuis le jardin d'Eden.
- Alors on les prendra avec nous... Tu en penses quoi, mon chéri ?
Et une bouche chaude enveloppa son sexe.
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