L’argument spécifique dont nous allons discuter, en faveur de l’immatérialité de nos facultés rationnelles, est un argument qui tire ses racines dans Platon et Aristote, mais qui reçut une exposition encore plus tranchante par le philosophe catholique James Ross dans son article de 1992 « Immaterial Aspects of Thought », et dans son livre de 2008 « Thought and World ». Edward Feser a aussi défendu cet argument et élaboré dessus dans de multiples publications ; mais nous n’allons donner ici qu’une introduction au cœur de l’argument et répondre à certaines de ses objections les plus courantes. Je préviens, c'est un argument un peu technique mais je pense aussi que bien compris, c'est l'un des plus convaincants et dévastateurs.
L’idée de base de cet argument est très simple et peut être formulée sous la forme d’un syllogisme :
I) Les processus de pensée formelle peuvent avoir un contenu conceptuel exact ou non ambigu
II) Rien de matériel ne peut avoir un contenu conceptuel exact ou non ambigu
Conclusion : Par conséquent, les processus de pensée formelle ne sont pas matériels
Le syllogisme est valide : cela veut dire que si l’on accepte ses prémisses nous sommes obligés d’accepter sa conclusion. Donc pourquoi devrions-nous accepter ses prémisses ?
Commençons par la prémisse 2) avec un exemple très élémentaire et intuitif. Considérez une représentation picturale simple, comme un dessin de triangle à l’encre noire sur un tableau. Quel est le contenu conceptuel de cette représentation ? Est-ce qu’elle représente la triangularité en tant qu’abstraction ? Ou seulement les triangles noirs spécifiquement ? Ou peut-être seulement les triangles noirs isocèles spécifiquement ? Est-ce qu’elle ne représente pas plutôt quelque chose d’autre ? Comme une pyramide, ou une part de pizza ? Il n’y a rien dans les propriétés physiques de cette représentation qui pourrait ne nous le dire. Étudier la taille de l’image, la largeur de sa ligne, la chimie de l’encre avec laquelle elle a été dessinée, etc., ne nous fournirait aucune réponse à cette question. Car peu importe la liste de propriétés chimiques que cette image contiendrait, elles seraient toutes compatibles avec différentes attributions de contenus conceptuels possibles à l’image.
Remarquez qu’ajouter quelque chose à l’image, comme écrire le mot « triangle » en dessous, ne changerait pas la situation. Car le fait que cette séquence particulière de formes ou de sons compte comme un mot en premier lieu, encore davantage comme un mot avec un sens précis tel que le mot « triangle », n’a rien à voir avec ses propriétés physiques. C’est entièrement une question de convention. Et même en acceptant le sens coutumier de ce mot, il y aurait toujours des interprétations alternatives de cette nouvelle image avec le mot en dessous. Par exemple, cette image pourrait représenter les triangles eux-mêmes, ou elle pourrait représenter le mot français « triangle », ou elle pourrait même représenter le pop band Japonais « Triangle ».
Rien dans les propriétés physiques du mot et de l’image ne peut suffire à nous dire précisément quel contenu conceptuel ils transmettent. Cela restera vrai peu importe quel détail nous rajoutons à l’image ; il y aura toujours des interprétations alternatives. Les propriétés physiques de n’importe quelle représentation matérielle sont indéterminés, ou ambigus, quant à leur contenu. Quel que soit le contenu conceptuel que l’image aura, cela devra être déterminé par quelque chose d’autre que ses propriétés. Ross va plus loin en reprenant des concepts du philosophe Kripke afin de démontrer que la même chose peut-être dite de toute proposition ou phrase. Les philosophes analytiques contemporains nomment ce phénomène « l’indétermination du sens ».
Voilà qui confirme la prémisse 2 de notre syllogisme. À partir de cela, un matérialiste pourrait remettre la prémisse 1 en question, et conclure qu’aucune des phrases que nous prononçons et des pensées que nous avons n’a de contenu conceptuel exact, non ambigu ou déterminé. En effet, les philosophes Quine et Dennett ont justement conclu cela à partir d’arguments semblables à celui qui vient d’être donné. Car si vous soutenez, comme le matérialisme le fait, que les faits physiques sont tout ce qui existe, mais que vous reconnaissez ensuite que ces faits physiques ne sont pas suffisants pour déterminer qu’une représentation matérielle a un sens plutôt qu’un autre, alors vous devez dire qu’il n’y a juste aucun moyen de dire si une représentation matérielle possède un sens plutôt qu’un autre.
Cela nous amène à la prémisse 1 du syllogisme de Ross. Ross soutient que toutes nos pensées ont bel et bien un contenu conceptuel déterminé, ou non ambigu - mais les exemples les plus clairs impliquent de la pensée formelle, donc il se concentre sur eux et nous ferons de même. La pensée formelle est le type de réflexion que l’on retrouve dans les mathématiques et la logique formelle. Additionner et soustraire, faire une racine carrée, raisonner à travers un syllogisme catégorique, ou appliquer des règles d’inférences comme le modus ponens ou le modus tollens, sont autant d’exemples de pensée formelle. Dire, comme certains matérialistes le font, que nos pensées formelles ne sont pas conceptuellement déterminées, et qu’il n’y a donc aucun fait objectif sur ce que nos pensées ou phrases veulent dire, implique qu’il n’y a aucun fait objectif permettant de nous dire si nous sommes réellement en train d’additionner, de soustraire, d’appliquer des modus ponens, etc. Mais cela, argumente Ross, ne peut pas être vrai, et voici quelques raisons du pourquoi.
Déjà, si notre phénoménologie pouvait avoir tort sur quelque chose comme le fait que nous soyons bien objectivement en train d’additionner et pas de faire quelque chose d’autre, comment pourrions-nous être confiants qu’elle a raison sur quoi que ce soit d’autre ? Par exemple, si nous nous trompions dans la production de jugements à propos du contenu conceptuel de nos propres pensées, comment savons-nous que nous ne nous trompons pas aussi quand nous émettons des jugements sur le contenu conceptuel de nos expériences perceptuelles ? Et dans ce cas, qu’arriverait-il aux preuves observationnelles et expérimentales sur lesquelles la science physique repose ? Par exemple, si un scientifique pense avoir une expérience perceptuelle où il voit l’aiguille d’un appareil pointer vers un certain chiffre, comment pourrait-il être sur qu’il n’a pas à la place une expérience de tout autre chose ?
Un second problème, c’est qu’il est rare de voir comment la thèse qu’il n’y a pas de fait objectif sur le contenu de nos pensées formelles peut être réconciliée avec l’existence de la vaste somme de connaissances que comprennent les disciplines que sont les mathématiques et la logique formelle, où le simple fait que les mathématiques et la logique constituent de réelles connaissances à proprement parler. Et ces deux disciplines sont également présupposées par les sciences naturelles. Donc encore une fois, nier que n’importe laquelle de nos pensées ait un contenu conceptuel non ambigu semble détruire la possibilité même des sciences naturelles.
Un troisième problème, est que si nous nous trompons sur le contenu conceptuel de nos pensées formelles, et que nous n’appliquons jamais vraiment certainement de modus ponens, de modus tollens, ou toute autre forme d’inférence logique, alors il s’ensuivrait qu’aucun des arguments que nous pourrions donner ne puissent jamais être valide. Mais cela concernerait aussi les arguments des philosophes matérialistes comme Quine et Dennett, qui nient que leur pensées et propositions aient un contenu conceptuel exact ou déterminé. Ainsi, leur position s’auto-réfute. Même si elle était vraie, nous ne serions jamais rationnellement justifiés pour croire qu’elle est vraie, car nous ne pourrions pas être rationnellement justifiés à croire quoi que ce soit.
Quatrième objection, l’affirmation qu’il est possible que nous nous trompions sur le contenu conceptuel de nos pensées formelles, et qu’il est possible que nous n’appliquions jamais vraiment de modus ponens, de modus tollens, d’addition, etc., s’auto-réfute d’une façon encore plus directe et fatale. Car nier de façon cohérente que nous fassions ces choses, présuppose que nous ayons au moins une compréhension de ce que ça serait de faire ces choses. Et cela veut dire avoir des pensées dont le contenu conceptuel est non ambigu comme celles que les matérialistes Quine et Dennett disent que nous n’avons pas. En particulier, dire qu’il est possible qu’au fond nous n’additionnons jamais vraiment, nécessite d’avoir une compréhension non ambigue de ce qu’est qu’aditionner, et ensuite que nous nions faire une telle chose. Dire qu’il est possible que nous nous trompions et que nous n’appliquions jamais vraiment de modus ponens, nécessite que nous comprenions d’abord de façon non ambiguë ce que c’est que de raisonner via un modus ponens, et ensuite de nier que nous fassions jamais une telle chose. Etc.
Pour creuser :Il semble donc que l'immatérialité de nos facultés rationnelles soit inévitable. Et ce d'autant plus dans le paradigme actuel. En effet, le matérialisme a hérité de Galilée, Descartes, Locke, et d’autres penseurs modernes, une conception hautement mathématisée du monde matériel, selon laquelle la matière ne possède que des « qualités premières » quantifiables, comme la localisation spatiale, le mouvement, la taille, etc., et est dénuée de tout ce qui correspond à ce qui est nommé les « qualités secondaires », comme la couleur, l’odeur, le son, le goût, le chaud, le froid, etc., au moins de la façon dont le bon sens commun comprend ces qualités.
Dans cette compréhension, si vous voulez redéfinir une qualité, comme « être rouge » par exemple, en termes de « tendances qu’ont certains objets à absorber et refléter certaines longueurs d’onde de la lumière », alors seulement vous pouvez dire qu’ « une pomme est rouge ». Mais si par « être rouge » vous entendez ce que le bon sens commun entend par « être rouge », à savoir « ce à quoi le rouge ressemble pour un observateur normal », mais ne ressemblerait pas pour un observateur daltonien, alors il n’y a rien dans la pomme en soi qui corresponde à ça, et vous ne pouvez pas vraiment dire qu’ « une pomme est rouge ». Et il en est de même pour les autres couleurs, pour les goûts, les odeurs, les sons, etc.
Les caractéristiques irréductiblement qualitatives étaient prises par les premiers philosophes et scientifiques modernes comme existant seulement en tant que qualia de l’expérience - comme des parties du voile des perceptions à travers lequel nous somme conscients du monde matériel, et non comme des parties du monde matériel lui-même.
Mais si vous définissez la matière de cette façon, alors vous vous êtes déjà implicitement engagé dans une forme de dualisme, que vous le réalisiez ou non.
Car si vous dites que les couleurs, odeurs, sons, goûts, etc., tels que le bon sens commun comprend ces caractéristiques, n’existent pas dans la matière, cela implique qu’elles n’existent pas non plus dans le cerveau, puisque le cerveau n’est pas moins matériel que les objets en dehors de lui. Dès lors, si vous dites aussi que ces caractéristiques existent dans l’esprit, dans notre expérience consciente de la matière, alors vous dites que l’esprit n’est pas matériel.
Ainsi, un dualisme de type cartésien n’est en aucune façon une sorte de résistance étrange au mode d’explication scientifique moderne, mais au contraire en découle.
En effet, les premiers penseurs modernes, comme Malebranche et Ralph Cudworth, insistaient là-dessus. Bizarrement, la plupart des philosophes et scientifiques contemporains semblent aveugles au fait qu’un dualisme cartésien soit logé à la racine de la compréhension scientifique moderne de la matière - bien que Schrödinger soit un des scientifiques qui vit la connexion entre les deux, ainsi que Thomas Nagel parmi les philosophes.
Et ce qui est vrai des qualia est aussi vrai de l’intentionnalité, car un autre aspect clef de la conception mathématisée de la matière c’est qu’elle laisse de côté tout ce qui pourrait embrasser, de près ou de loin, la notion aristotélicienne de cause finale ou de téléologie. Essentiellement, la téléologie implique qu’une chose soit dirigée vers, ou pointe vers une fin. Par exemple, on peut dire d’un gland qu’il est dirigé vers le fait de devenir un chêne, ou un œil peut être dit dirigé vers le fait de pouvoir permettre à un organisme de voir. Dire que la matière est dénuée de téléologie revient donc à dire qu’il n’y a pas de telle « directionnalité » comprise en son sein.
Mais l’intentionnalité est une espèce de directionnalité. Donc s’il n’y a pas de téléologie inhérente à la matière, il n’y a pas non plus d’intentionnalité inhérente à la matière. Mais l’intentionnalité existe dans l’esprit, en particulier dans nos pensées - vu qu’une pensée est toujours dirigée vers, ou est à propos de, un certain objet ou sujet. L’intentionnalité existe aussi dans nos choix, qui sont orientés vers la réalisation de certains buts. Ainsi, affirmer qu’il y a de l’intentionnalité dans l’esprit tout en soutenant une conception mathématisée de la matière revient à implicitement vous engager à une forme de dualisme.
Et nier l’intentionnalité revient à nier tout sens dans le langage. En résumé : tant que le matérialisme moderne aura une conception mathématisée de la matière, il contiendra en lui-même les graines de sa propre destruction via le dualisme qu’il présuppose.
Un pavé césar pour expliquer que l'information n'est pas matérielle, chaud
Le 27 octobre 2021 à 21:18:38 :
Un pavé césar pour expliquer que l'information n'est pas matérielle, chaudhttps://image.noelshack.com/fichiers/2021/36/5/1631241525-qlf-chofa-facho-blond-yeux-bleu-ronaldo-ent-vaxx.png
Oui et non, c'est pas exactement ça. On parle ici davantage du sens. Dans les deux cas, cela assure l'immatérialité de nos facultés rationnelles.
Le 27 octobre 2021 à 21:17:39 :
L’argument spécifique dont nous allons discuter, en faveur de l’immatérialité de nos facultés rationnelles, est un argument qui tire ses racines dans Platon et Aristote, mais qui reçut une exposition encore plus tranchante par le philosophe catholique James Ross dans son article de 1992 « Immaterial Aspects of Thought », et dans son livre de 2008 « Thought and World ». Edward Feser a aussi défendu cet argument et élaboré dessus dans de multiples publications ; mais nous n’allons donner ici qu’une introduction au cœur de l’argument et répondre à certaines de ses objections les plus courantes. Je préviens, c'est un argument un peu technique mais je pense aussi que bien compris, c'est l'un des plus convaincants et dévastateurs.L’idée de base de cet argument est très simple et peut être formulée sous la forme d’un syllogisme :
I) Les processus de pensée formelle peuvent avoir un contenu conceptuel exact ou non ambigu
II) Rien de matériel ne peut avoir un contenu conceptuel exact ou non ambigu
Conclusion : Par conséquent, les processus de pensée formelle ne sont pas matérielsLe syllogisme est valide : cela veut dire que si l’on accepte ses prémisses nous sommes obligés d’accepter sa conclusion. Donc pourquoi devrions-nous accepter ses prémisses ?
Commençons par la prémisse 2) avec un exemple très élémentaire et intuitif. Considérez une représentation picturale simple, comme un dessin de triangle à l’encre noire sur un tableau. Quel est le contenu conceptuel de cette représentation ? Est-ce qu’elle représente la triangularité en tant qu’abstraction ? Ou seulement les triangles noirs spécifiquement ? Ou peut-être seulement les triangles noirs isocèles spécifiquement ? Est-ce qu’elle ne représente pas plutôt quelque chose d’autre ? Comme une pyramide, ou une part de pizza ? Il n’y a rien dans les propriétés physiques de cette représentation qui pourrait ne nous le dire. Étudier la taille de l’image, la largeur de sa ligne, la chimie de l’encre avec laquelle elle a été dessinée, etc., ne nous fournirait aucune réponse à cette question. Car peu importe la liste de propriétés chimiques que cette image contiendrait, elles seraient toutes compatibles avec différentes attributions de contenus conceptuels possibles à l’image.
Remarquez qu’ajouter quelque chose à l’image, comme écrire le mot « triangle » en dessous, ne changerait pas la situation. Car le fait que cette séquence particulière de formes ou de sons compte comme un mot en premier lieu, encore davantage comme un mot avec un sens précis tel que le mot « triangle », n’a rien à voir avec ses propriétés physiques. C’est entièrement une question de convention. Et même en acceptant le sens coutumier de ce mot, il y aurait toujours des interprétations alternatives de cette nouvelle image avec le mot en dessous. Par exemple, cette image pourrait représenter les triangles eux-mêmes, ou elle pourrait représenter le mot français « triangle », ou elle pourrait même représenter le pop band Japonais « Triangle ».
Rien dans les propriétés physiques du mot et de l’image ne peut suffire à nous dire précisément quel contenu conceptuel ils transmettent. Cela restera vrai peu importe quel détail nous rajoutons à l’image ; il y aura toujours des interprétations alternatives. Les propriétés physiques de n’importe quelle représentation matérielle sont indéterminés, ou ambigus, quant à leur contenu. Quel que soit le contenu conceptuel que l’image aura, cela devra être déterminé par quelque chose d’autre que ses propriétés. Ross va plus loin en reprenant des concepts du philosophe Kripke afin de démontrer que la même chose peut-être dite de toute proposition ou phrase. Les philosophes analytiques contemporains nomment ce phénomène « l’indétermination du sens ».
Voilà qui confirme la prémisse 2 de notre syllogisme. À partir de cela, un matérialiste pourrait remettre la prémisse 1 en question, et conclure qu’aucune des phrases que nous prononçons et des pensées que nous avons n’a de contenu conceptuel exact, non ambigu ou déterminé. En effet, les philosophes Quine et Dennett ont justement conclu cela à partir d’arguments semblables à celui qui vient d’être donné. Car si vous soutenez, comme le matérialisme le fait, que les faits physiques sont tout ce qui existe, mais que vous reconnaissez ensuite que ces faits physiques ne sont pas suffisants pour déterminer qu’une représentation matérielle a un sens plutôt qu’un autre, alors vous devez dire qu’il n’y a juste aucun moyen de dire si une représentation matérielle possède un sens plutôt qu’un autre.
Cela nous amène à la prémisse 1 du syllogisme de Ross. Ross soutient que toutes nos pensées ont bel et bien un contenu conceptuel déterminé, ou non ambigu - mais les exemples les plus clairs impliquent de la pensée formelle, donc il se concentre sur eux et nous ferons de même. La pensée formelle est le type de réflexion que l’on retrouve dans les mathématiques et la logique formelle. Additionner et soustraire, faire une racine carrée, raisonner à travers un syllogisme catégorique, ou appliquer des règles d’inférences comme le modus ponens ou le modus tollens, sont autant d’exemples de pensée formelle. Dire, comme certains matérialistes le font, que nos pensées formelles ne sont pas conceptuellement déterminées, et qu’il n’y a donc aucun fait objectif sur ce que nos pensées ou phrases veulent dire, implique qu’il n’y a aucun fait objectif permettant de nous dire si nous sommes réellement en train d’additionner, de soustraire, d’appliquer des modus ponens, etc. Mais cela, argumente Ross, ne peut pas être vrai, et voici quelques raisons du pourquoi.
Déjà, si notre phénoménologie pouvait avoir tort sur quelque chose comme le fait que nous soyons bien objectivement en train d’additionner et pas de faire quelque chose d’autre, comment pourrions-nous être confiants qu’elle a raison sur quoi que ce soit d’autre ? Par exemple, si nous nous trompions dans la production de jugements à propos du contenu conceptuel de nos propres pensées, comment savons-nous que nous ne nous trompons pas aussi quand nous émettons des jugements sur le contenu conceptuel de nos expériences perceptuelles ? Et dans ce cas, qu’arriverait-il aux preuves observationnelles et expérimentales sur lesquelles la science physique repose ? Par exemple, si un scientifique pense avoir une expérience perceptuelle où il voit l’aiguille d’un appareil pointer vers un certain chiffre, comment pourrait-il être sur qu’il n’a pas à la place une expérience de tout autre chose ?
Un second problème, c’est qu’il est rare de voir comment la thèse qu’il n’y a pas de fait objectif sur le contenu de nos pensées formelles peut être réconciliée avec l’existence de la vaste somme de connaissances que comprennent les disciplines que sont les mathématiques et la logique formelle, où le simple fait que les mathématiques et la logique constituent de réelles connaissances à proprement parler. Et ces deux disciplines sont également présupposées par les sciences naturelles. Donc encore une fois, nier que n’importe laquelle de nos pensées ait un contenu conceptuel non ambigu semble détruire la possibilité même des sciences naturelles.
Un troisième problème, est que si nous nous trompons sur le contenu conceptuel de nos pensées formelles, et que nous n’appliquons jamais vraiment certainement de modus ponens, de modus tollens, ou toute autre forme d’inférence logique, alors il s’ensuivrait qu’aucun des arguments que nous pourrions donner ne puissent jamais être valide. Mais cela concernerait aussi les arguments des philosophes matérialistes comme Quine et Dennett, qui nient que leur pensées et propositions aient un contenu conceptuel exact ou déterminé. Ainsi, leur position s’auto-réfute. Même si elle était vraie, nous ne serions jamais rationnellement justifiés pour croire qu’elle est vraie, car nous ne pourrions pas être rationnellement justifiés à croire quoi que ce soit.
Quatrième objection, l’affirmation qu’il est possible que nous nous trompions sur le contenu conceptuel de nos pensées formelles, et qu’il est possible que nous n’appliquions jamais vraiment de modus ponens, de modus tollens, d’addition, etc., s’auto-réfute d’une façon encore plus directe et fatale. Car nier de façon cohérente que nous fassions ces choses, présuppose que nous ayons au moins une compréhension de ce que ça serait de faire ces choses. Et cela veut dire avoir des pensées dont le contenu conceptuel est non ambigu comme celles que les matérialistes Quine et Dennett disent que nous n’avons pas. En particulier, dire qu’il est possible qu’au fond nous n’additionnons jamais vraiment, nécessite d’avoir une compréhension non ambigue de ce qu’est qu’aditionner, et ensuite que nous nions faire une telle chose. Dire qu’il est possible que nous nous trompions et que nous n’appliquions jamais vraiment de modus ponens, nécessite que nous comprenions d’abord de façon non ambiguë ce que c’est que de raisonner via un modus ponens, et ensuite de nier que nous fassions jamais une telle chose. Etc.
Pour creuser :
- https://www.newdualism.org/papers/E.Feser/Feser-acpq_2013.pdf
- https://edwardfeser.blogspot.com/2017/01/revisiting-ross-on-immateriality-of.html
Le 27 octobre 2021 à 21:17:54 :
Il semble donc que l'immatérialité de nos facultés rationnelles soit inévitable. Et ce d'autant plus dans le paradigme actuel. En effet, le matérialisme a hérité de Galilée, Descartes, Locke, et d’autres penseurs modernes, une conception hautement mathématisée du monde matériel, selon laquelle la matière ne possède que des « qualités premières » quantifiables, comme la localisation spatiale, le mouvement, la taille, etc., et est dénuée de tout ce qui correspond à ce qui est nommé les « qualités secondaires », comme la couleur, l’odeur, le son, le goût, le chaud, le froid, etc., au moins de la façon dont le bon sens commun comprend ces qualités.https://image.noelshack.com/fichiers/2018/46/7/1542540466-snapchat4279484639-1.jpg Dans cette compréhension, si vous voulez redéfinir une qualité, comme « être rouge » par exemple, en termes de « tendances qu’ont certains objets à absorber et refléter certaines longueurs d’onde de la lumière », alors seulement vous pouvez dire qu’ « une pomme est rouge ». Mais si par « être rouge » vous entendez ce que le bon sens commun entend par « être rouge », à savoir « ce à quoi le rouge ressemble pour un observateur normal », mais ne ressemblerait pas pour un observateur daltonien, alors il n’y a rien dans la pomme en soi qui corresponde à ça, et vous ne pouvez pas vraiment dire qu’ « une pomme est rouge ». Et il en est de même pour les autres couleurs, pour les goûts, les odeurs, les sons, etc.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/7/1501422769-freeze-corleone-fume.png Les caractéristiques irréductiblement qualitatives étaient prises par les premiers philosophes et scientifiques modernes comme existant seulement en tant que qualia de l’expérience - comme des parties du voile des perceptions à travers lequel nous somme conscients du monde matériel, et non comme des parties du monde matériel lui-même.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/7/1501422770-freeze-corleone-fume-2.png Mais si vous définissez la matière de cette façon, alors vous vous êtes déjà implicitement engagé dans une forme de dualisme, que vous le réalisiez ou non.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/6/1501365570-freeze-corleone-chut-zamel.png Car si vous dites que les couleurs, odeurs, sons, goûts, etc., tels que le bon sens commun comprend ces caractéristiques, n’existent pas dans la matière, cela implique qu’elles n’existent pas non plus dans le cerveau, puisque le cerveau n’est pas moins matériel que les objets en dehors de lui. Dès lors, si vous dites aussi que ces caractéristiques existent dans l’esprit, dans notre expérience consciente de la matière, alors vous dites que l’esprit n’est pas matériel.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/7/1501422770-freeze-corleone-passement-de-jambes-et-des-crochets-original.png Ainsi, un dualisme de type cartésien n’est en aucune façon une sorte de résistance étrange au mode d’explication scientifique moderne, mais au contraire en découle.
https://image.noelshack.com/fichiers/2019/43/6/1572100648-freezer-2eme-forme-roule-sur-les-choffas-paz.gif En effet, les premiers penseurs modernes, comme Malebranche et Ralph Cudworth, insistaient là-dessus. Bizarrement, la plupart des philosophes et scientifiques contemporains semblent aveugles au fait qu’un dualisme cartésien soit logé à la racine de la compréhension scientifique moderne de la matière - bien que Schrödinger soit un des scientifiques qui vit la connexion entre les deux, ainsi que Thomas Nagel parmi les philosophes.
https://image.noelshack.com/fichiers/2018/46/2/1542069700-freeze-fait-tourner-la-ball-kekeh.png Et ce qui est vrai des qualia est aussi vrai de l’intentionnalité, car un autre aspect clef de la conception mathématisée de la matière c’est qu’elle laisse de côté tout ce qui pourrait embrasser, de près ou de loin, la notion aristotélicienne de cause finale ou de téléologie. Essentiellement, la téléologie implique qu’une chose soit dirigée vers, ou pointe vers une fin. Par exemple, on peut dire d’un gland qu’il est dirigé vers le fait de devenir un chêne, ou un œil peut être dit dirigé vers le fait de pouvoir permettre à un organisme de voir. Dire que la matière est dénuée de téléologie revient donc à dire qu’il n’y a pas de telle « directionnalité » comprise en son sein.
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/24/6/1592052638-667.png Mais l’intentionnalité est une espèce de directionnalité. Donc s’il n’y a pas de téléologie inhérente à la matière, il n’y a pas non plus d’intentionnalité inhérente à la matière. Mais l’intentionnalité existe dans l’esprit, en particulier dans nos pensées - vu qu’une pensée est toujours dirigée vers, ou est à propos de, un certain objet ou sujet. L’intentionnalité existe aussi dans nos choix, qui sont orientés vers la réalisation de certains buts. Ainsi, affirmer qu’il y a de l’intentionnalité dans l’esprit tout en soutenant une conception mathématisée de la matière revient à implicitement vous engager à une forme de dualisme.
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/4/1585835531-picture-20200402-155131858-removebg-preview.png Et nier l’intentionnalité revient à nier tout sens dans le langage. En résumé : tant que le matérialisme moderne aura une conception mathématisée de la matière, il contiendra en lui-même les graines de sa propre destruction via le dualisme qu’il présuppose.
https://image.noelshack.com/fichiers/2019/43/6/1572100648-freezer-2eme-forme-roule-sur-les-choffas-paz.gif
Le 27 octobre 2021 à 21:19:42 :
Le 27 octobre 2021 à 21:17:39 :
L’argument spécifique dont nous allons discuter, en faveur de l’immatérialité de nos facultés rationnelles, est un argument qui tire ses racines dans Platon et Aristote, mais qui reçut une exposition encore plus tranchante par le philosophe catholique James Ross dans son article de 1992 « Immaterial Aspects of Thought », et dans son livre de 2008 « Thought and World ». Edward Feser a aussi défendu cet argument et élaboré dessus dans de multiples publications ; mais nous n’allons donner ici qu’une introduction au cœur de l’argument et répondre à certaines de ses objections les plus courantes. Je préviens, c'est un argument un peu technique mais je pense aussi que bien compris, c'est l'un des plus convaincants et dévastateurs.L’idée de base de cet argument est très simple et peut être formulée sous la forme d’un syllogisme :
I) Les processus de pensée formelle peuvent avoir un contenu conceptuel exact ou non ambigu
II) Rien de matériel ne peut avoir un contenu conceptuel exact ou non ambigu
Conclusion : Par conséquent, les processus de pensée formelle ne sont pas matérielsLe syllogisme est valide : cela veut dire que si l’on accepte ses prémisses nous sommes obligés d’accepter sa conclusion. Donc pourquoi devrions-nous accepter ses prémisses ?
Commençons par la prémisse 2) avec un exemple très élémentaire et intuitif. Considérez une représentation picturale simple, comme un dessin de triangle à l’encre noire sur un tableau. Quel est le contenu conceptuel de cette représentation ? Est-ce qu’elle représente la triangularité en tant qu’abstraction ? Ou seulement les triangles noirs spécifiquement ? Ou peut-être seulement les triangles noirs isocèles spécifiquement ? Est-ce qu’elle ne représente pas plutôt quelque chose d’autre ? Comme une pyramide, ou une part de pizza ? Il n’y a rien dans les propriétés physiques de cette représentation qui pourrait ne nous le dire. Étudier la taille de l’image, la largeur de sa ligne, la chimie de l’encre avec laquelle elle a été dessinée, etc., ne nous fournirait aucune réponse à cette question. Car peu importe la liste de propriétés chimiques que cette image contiendrait, elles seraient toutes compatibles avec différentes attributions de contenus conceptuels possibles à l’image.
Remarquez qu’ajouter quelque chose à l’image, comme écrire le mot « triangle » en dessous, ne changerait pas la situation. Car le fait que cette séquence particulière de formes ou de sons compte comme un mot en premier lieu, encore davantage comme un mot avec un sens précis tel que le mot « triangle », n’a rien à voir avec ses propriétés physiques. C’est entièrement une question de convention. Et même en acceptant le sens coutumier de ce mot, il y aurait toujours des interprétations alternatives de cette nouvelle image avec le mot en dessous. Par exemple, cette image pourrait représenter les triangles eux-mêmes, ou elle pourrait représenter le mot français « triangle », ou elle pourrait même représenter le pop band Japonais « Triangle ».
Rien dans les propriétés physiques du mot et de l’image ne peut suffire à nous dire précisément quel contenu conceptuel ils transmettent. Cela restera vrai peu importe quel détail nous rajoutons à l’image ; il y aura toujours des interprétations alternatives. Les propriétés physiques de n’importe quelle représentation matérielle sont indéterminés, ou ambigus, quant à leur contenu. Quel que soit le contenu conceptuel que l’image aura, cela devra être déterminé par quelque chose d’autre que ses propriétés. Ross va plus loin en reprenant des concepts du philosophe Kripke afin de démontrer que la même chose peut-être dite de toute proposition ou phrase. Les philosophes analytiques contemporains nomment ce phénomène « l’indétermination du sens ».
Voilà qui confirme la prémisse 2 de notre syllogisme. À partir de cela, un matérialiste pourrait remettre la prémisse 1 en question, et conclure qu’aucune des phrases que nous prononçons et des pensées que nous avons n’a de contenu conceptuel exact, non ambigu ou déterminé. En effet, les philosophes Quine et Dennett ont justement conclu cela à partir d’arguments semblables à celui qui vient d’être donné. Car si vous soutenez, comme le matérialisme le fait, que les faits physiques sont tout ce qui existe, mais que vous reconnaissez ensuite que ces faits physiques ne sont pas suffisants pour déterminer qu’une représentation matérielle a un sens plutôt qu’un autre, alors vous devez dire qu’il n’y a juste aucun moyen de dire si une représentation matérielle possède un sens plutôt qu’un autre.
Cela nous amène à la prémisse 1 du syllogisme de Ross. Ross soutient que toutes nos pensées ont bel et bien un contenu conceptuel déterminé, ou non ambigu - mais les exemples les plus clairs impliquent de la pensée formelle, donc il se concentre sur eux et nous ferons de même. La pensée formelle est le type de réflexion que l’on retrouve dans les mathématiques et la logique formelle. Additionner et soustraire, faire une racine carrée, raisonner à travers un syllogisme catégorique, ou appliquer des règles d’inférences comme le modus ponens ou le modus tollens, sont autant d’exemples de pensée formelle. Dire, comme certains matérialistes le font, que nos pensées formelles ne sont pas conceptuellement déterminées, et qu’il n’y a donc aucun fait objectif sur ce que nos pensées ou phrases veulent dire, implique qu’il n’y a aucun fait objectif permettant de nous dire si nous sommes réellement en train d’additionner, de soustraire, d’appliquer des modus ponens, etc. Mais cela, argumente Ross, ne peut pas être vrai, et voici quelques raisons du pourquoi.
Déjà, si notre phénoménologie pouvait avoir tort sur quelque chose comme le fait que nous soyons bien objectivement en train d’additionner et pas de faire quelque chose d’autre, comment pourrions-nous être confiants qu’elle a raison sur quoi que ce soit d’autre ? Par exemple, si nous nous trompions dans la production de jugements à propos du contenu conceptuel de nos propres pensées, comment savons-nous que nous ne nous trompons pas aussi quand nous émettons des jugements sur le contenu conceptuel de nos expériences perceptuelles ? Et dans ce cas, qu’arriverait-il aux preuves observationnelles et expérimentales sur lesquelles la science physique repose ? Par exemple, si un scientifique pense avoir une expérience perceptuelle où il voit l’aiguille d’un appareil pointer vers un certain chiffre, comment pourrait-il être sur qu’il n’a pas à la place une expérience de tout autre chose ?
Un second problème, c’est qu’il est rare de voir comment la thèse qu’il n’y a pas de fait objectif sur le contenu de nos pensées formelles peut être réconciliée avec l’existence de la vaste somme de connaissances que comprennent les disciplines que sont les mathématiques et la logique formelle, où le simple fait que les mathématiques et la logique constituent de réelles connaissances à proprement parler. Et ces deux disciplines sont également présupposées par les sciences naturelles. Donc encore une fois, nier que n’importe laquelle de nos pensées ait un contenu conceptuel non ambigu semble détruire la possibilité même des sciences naturelles.
Un troisième problème, est que si nous nous trompons sur le contenu conceptuel de nos pensées formelles, et que nous n’appliquons jamais vraiment certainement de modus ponens, de modus tollens, ou toute autre forme d’inférence logique, alors il s’ensuivrait qu’aucun des arguments que nous pourrions donner ne puissent jamais être valide. Mais cela concernerait aussi les arguments des philosophes matérialistes comme Quine et Dennett, qui nient que leur pensées et propositions aient un contenu conceptuel exact ou déterminé. Ainsi, leur position s’auto-réfute. Même si elle était vraie, nous ne serions jamais rationnellement justifiés pour croire qu’elle est vraie, car nous ne pourrions pas être rationnellement justifiés à croire quoi que ce soit.
Quatrième objection, l’affirmation qu’il est possible que nous nous trompions sur le contenu conceptuel de nos pensées formelles, et qu’il est possible que nous n’appliquions jamais vraiment de modus ponens, de modus tollens, d’addition, etc., s’auto-réfute d’une façon encore plus directe et fatale. Car nier de façon cohérente que nous fassions ces choses, présuppose que nous ayons au moins une compréhension de ce que ça serait de faire ces choses. Et cela veut dire avoir des pensées dont le contenu conceptuel est non ambigu comme celles que les matérialistes Quine et Dennett disent que nous n’avons pas. En particulier, dire qu’il est possible qu’au fond nous n’additionnons jamais vraiment, nécessite d’avoir une compréhension non ambigue de ce qu’est qu’aditionner, et ensuite que nous nions faire une telle chose. Dire qu’il est possible que nous nous trompions et que nous n’appliquions jamais vraiment de modus ponens, nécessite que nous comprenions d’abord de façon non ambiguë ce que c’est que de raisonner via un modus ponens, et ensuite de nier que nous fassions jamais une telle chose. Etc.
Pour creuser :
- https://www.newdualism.org/papers/E.Feser/Feser-acpq_2013.pdf
- https://edwardfeser.blogspot.com/2017/01/revisiting-ross-on-immateriality-of.html
Le 27 octobre 2021 à 21:17:54 :
Il semble donc que l'immatérialité de nos facultés rationnelles soit inévitable. Et ce d'autant plus dans le paradigme actuel. En effet, le matérialisme a hérité de Galilée, Descartes, Locke, et d’autres penseurs modernes, une conception hautement mathématisée du monde matériel, selon laquelle la matière ne possède que des « qualités premières » quantifiables, comme la localisation spatiale, le mouvement, la taille, etc., et est dénuée de tout ce qui correspond à ce qui est nommé les « qualités secondaires », comme la couleur, l’odeur, le son, le goût, le chaud, le froid, etc., au moins de la façon dont le bon sens commun comprend ces qualités.https://image.noelshack.com/fichiers/2018/46/7/1542540466-snapchat4279484639-1.jpg Dans cette compréhension, si vous voulez redéfinir une qualité, comme « être rouge » par exemple, en termes de « tendances qu’ont certains objets à absorber et refléter certaines longueurs d’onde de la lumière », alors seulement vous pouvez dire qu’ « une pomme est rouge ». Mais si par « être rouge » vous entendez ce que le bon sens commun entend par « être rouge », à savoir « ce à quoi le rouge ressemble pour un observateur normal », mais ne ressemblerait pas pour un observateur daltonien, alors il n’y a rien dans la pomme en soi qui corresponde à ça, et vous ne pouvez pas vraiment dire qu’ « une pomme est rouge ». Et il en est de même pour les autres couleurs, pour les goûts, les odeurs, les sons, etc.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/7/1501422769-freeze-corleone-fume.png Les caractéristiques irréductiblement qualitatives étaient prises par les premiers philosophes et scientifiques modernes comme existant seulement en tant que qualia de l’expérience - comme des parties du voile des perceptions à travers lequel nous somme conscients du monde matériel, et non comme des parties du monde matériel lui-même.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/7/1501422770-freeze-corleone-fume-2.png Mais si vous définissez la matière de cette façon, alors vous vous êtes déjà implicitement engagé dans une forme de dualisme, que vous le réalisiez ou non.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/6/1501365570-freeze-corleone-chut-zamel.png Car si vous dites que les couleurs, odeurs, sons, goûts, etc., tels que le bon sens commun comprend ces caractéristiques, n’existent pas dans la matière, cela implique qu’elles n’existent pas non plus dans le cerveau, puisque le cerveau n’est pas moins matériel que les objets en dehors de lui. Dès lors, si vous dites aussi que ces caractéristiques existent dans l’esprit, dans notre expérience consciente de la matière, alors vous dites que l’esprit n’est pas matériel.
https://image.noelshack.com/fichiers/2017/30/7/1501422770-freeze-corleone-passement-de-jambes-et-des-crochets-original.png Ainsi, un dualisme de type cartésien n’est en aucune façon une sorte de résistance étrange au mode d’explication scientifique moderne, mais au contraire en découle.
https://image.noelshack.com/fichiers/2019/43/6/1572100648-freezer-2eme-forme-roule-sur-les-choffas-paz.gif En effet, les premiers penseurs modernes, comme Malebranche et Ralph Cudworth, insistaient là-dessus. Bizarrement, la plupart des philosophes et scientifiques contemporains semblent aveugles au fait qu’un dualisme cartésien soit logé à la racine de la compréhension scientifique moderne de la matière - bien que Schrödinger soit un des scientifiques qui vit la connexion entre les deux, ainsi que Thomas Nagel parmi les philosophes.
https://image.noelshack.com/fichiers/2018/46/2/1542069700-freeze-fait-tourner-la-ball-kekeh.png Et ce qui est vrai des qualia est aussi vrai de l’intentionnalité, car un autre aspect clef de la conception mathématisée de la matière c’est qu’elle laisse de côté tout ce qui pourrait embrasser, de près ou de loin, la notion aristotélicienne de cause finale ou de téléologie. Essentiellement, la téléologie implique qu’une chose soit dirigée vers, ou pointe vers une fin. Par exemple, on peut dire d’un gland qu’il est dirigé vers le fait de devenir un chêne, ou un œil peut être dit dirigé vers le fait de pouvoir permettre à un organisme de voir. Dire que la matière est dénuée de téléologie revient donc à dire qu’il n’y a pas de telle « directionnalité » comprise en son sein.
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/24/6/1592052638-667.png Mais l’intentionnalité est une espèce de directionnalité. Donc s’il n’y a pas de téléologie inhérente à la matière, il n’y a pas non plus d’intentionnalité inhérente à la matière. Mais l’intentionnalité existe dans l’esprit, en particulier dans nos pensées - vu qu’une pensée est toujours dirigée vers, ou est à propos de, un certain objet ou sujet. L’intentionnalité existe aussi dans nos choix, qui sont orientés vers la réalisation de certains buts. Ainsi, affirmer qu’il y a de l’intentionnalité dans l’esprit tout en soutenant une conception mathématisée de la matière revient à implicitement vous engager à une forme de dualisme.
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/4/1585835531-picture-20200402-155131858-removebg-preview.png Et nier l’intentionnalité revient à nier tout sens dans le langage. En résumé : tant que le matérialisme moderne aura une conception mathématisée de la matière, il contiendra en lui-même les graines de sa propre destruction via le dualisme qu’il présuppose.
https://image.noelshack.com/fichiers/2019/43/6/1572100648-freezer-2eme-forme-roule-sur-les-choffas-paz.gif
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/11/1/1615833199-enormeculmanger.png Tout le monde s'en fouuuuuuuuu
Merci du up le mongolito
Les idées viennent du cerveau, fin du débat. Les idées sont matérielles, c'est une connexion entre deux synapses.
Le 27 octobre 2021 à 21:22:13 :
Les idées viennent du cerveau, fin du débat. Les idées sont matérielles, c'est une connexion entre deux synapses.
Non, fin du débat. T'as vu, c'est simple d'affirmer sans argumenter.
Mais c'est beaucoup trop long
Le 27 octobre 2021 à 21:25:21 :
Mais c'est beaucoup trop longhttps://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585972175-1583959707-timide5.png
Comme ma sagacité
Le 27 octobre 2021 à 21:25:45 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:21 :
Mais c'est beaucoup trop longhttps://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585972175-1583959707-timide5.png Comme ma sagacité
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Parle français on comprends la moitié de ce que tu dis
Le 27 octobre 2021 à 21:26:36 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:45 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:21 :
Mais c'est beaucoup trop longhttps://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585972175-1583959707-timide5.png Comme ma sagacité
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/39/7/1633295253-tison-lunette.png Parle français on comprends la moitié de ce que tu dis
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585971129-000.png
Ouvre un dictionnaire
Le 27 octobre 2021 à 21:26:27 :
up + fav
Merci
Le 27 octobre 2021 à 21:26:58 :
Le 27 octobre 2021 à 21:26:36 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:45 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:21 :
Mais c'est beaucoup trop longhttps://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585972175-1583959707-timide5.png Comme ma sagacité
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https://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585971129-000.png Ouvre un dictionnaire
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/39/7/1633295253-tison-lunette.png Le 27 octobre 2021 à 21:26:27 :
up + favMerci
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/39/7/1633295253-tison-lunette.png
Pourquoi tu fais le méchant ?
Le 27 octobre 2021 à 21:27:49 :
Le 27 octobre 2021 à 21:26:58 :
Le 27 octobre 2021 à 21:26:36 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:45 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:21 :
Mais c'est beaucoup trop longhttps://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585972175-1583959707-timide5.png Comme ma sagacité
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/39/7/1633295253-tison-lunette.png Parle français on comprends la moitié de ce que tu dis
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585971129-000.png Ouvre un dictionnaire
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/39/7/1633295253-tison-lunette.png Le 27 octobre 2021 à 21:26:27 :
up + favMerci
https://image.noelshack.com/fichiers/2021/39/7/1633295253-tison-lunette.png Pourquoi tu fais le méchant ?
https://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585970933-sticker-panique.png
C'est toi qui m'attaques "gngn parl fronsé"
Le 27 octobre 2021 à 21:28:00 :
intéressant
Merci
Le 27 octobre 2021 à 21:28:08 :
Le 27 octobre 2021 à 21:27:49 :
Le 27 octobre 2021 à 21:26:58 :
Le 27 octobre 2021 à 21:26:36 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:45 :
Le 27 octobre 2021 à 21:25:21 :
Mais c'est beaucoup trop longhttps://image.noelshack.com/fichiers/2020/14/6/1585972175-1583959707-timide5.png Comme ma sagacité
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Viens te battre si t'es un homme